Actualités


Actualité
Philippe Cotrel, maire du Touquet (62)
Elu pour serrer la vis

Le vainqueur de Léonce Deprez, aux dernières municipales, élu sur un programme de gestionnaire, préfère une image "authentique" pour sa station et limitera les investissements. l'hôtellerie s'organise et reprend doucement des couleurs.

Léonce Deprez, chef d'orchestre de la résurrection du Touquet Paris-Plage gloire éteinte d'avant-guerre, créateur du concept de "station des quatre saisons", a été battu d'une poignée de voix par un collègue ou presque : un chef de PME comme lui, un homme installé dans la région comme lui, un libéral modéré comme lui... Mais quelle mouche a donc piqué les Touquettois ? Réponses rapides : la peur de la dette municipale montante et le refus de l'impôt qui s'y attache, la crainte d'un changement trop rapide pouvant mettre en cause l'identité de la station, les échecs des installations hôtelières 4 étoiles de ces dernières années et l'effet crise sur les CHR, la volonté de donner un coup d'arrêt à la recherche systématique de l'expansion. Philippe Cotrel a donc été élu pour serrer les boulons, remettre de l'ordre dans la maison, assagir le développement dans la crise, rassurer.

Il n'a rien d'un notaire sur le retour pourtant et a construit à deux pas du Touquet une PME dynamique sur le marché des implants médicaux. L'affaire vendue, le voilà élu à plein temps. Pour quelle politique de tourisme et d'hôtellerie ? La station reste la grande affaire. Le maire a placé Jérôme Lebrec (42 ans) à sa tête. Cet ancien directeur général adjoint de SHB, un groupe d'hôtellerie et de restauration lyonnais spécialisé dans le thermalisme et la remise en forme, à la tête notamment de douze franchises Accor et de huit Best Western, y retrouve "une atmosphère très resort, mais de l'autre côté du miroir".

Croisant ses propres impressions avec un diagnostic établi peu de temps avant son arrivée par le cabinet Horwath, Jérôme Lebrec note quelques grands traits : Le Touquet dispose d'une notoriété nationale forte, un peu trop liée à l'Enduro, la course moto organisée en hiver sur la plage et dans les dunes. Cette notoriété est notée en troisième rang national chez les professionnels dans les destinations congrès. L'image est forte et distincte. Elle évoque environnement préservé, qualité, sport, bourgeoise, équitation, golf tennis, famille, vitrines, gastronomie. Un parfum de chevaux de feu. Une architecture plus normande que nordiste. Le Touquet est la station de la bonne famille saine et sportive, discrète et active dans le bois, élégante et bonne cliente à la ville. "C'est une image ancienne, transmise, revigorée par des manifestations récentes comme le festival du film de grand reportage. Sans cette image, la station disparaît", résume-t-il. Une image conservatrice donc. "Authentique", rectifie le maire. "Ce qui compte ici, c'est l'harmonie. Quand tout le monde choisissait le thermalisme avant-guerre, les Anglais ont bâti ici un ensemble architectural et des activités cohérentes. Peut être cette image ancienne est-elle à reconstruire, à préciser. Mais sans dénaturer son authenticité et son harmonie", résume le maire dans son incroyable beffroi de mairie néo-gothique bâtie en 1931 avec les recettes d'un an de casino.

Développement
"maîtrisé"

Le maire a commencé à tailler dur dans les dépenses municipales, non sans polémiques. Gérer oui. Mais Le Touquet est encore au milieu du gué. La station peut-elle encore se développer ? "Avec l'arrivée de l'autoroute A16, le développement est incontournable. Il faut en maîtriser la qualité tout en préservant notre authenticité", répond Philippe Cotrel. L'abandon à la suite d'une action de riverains du projet d'implantation d'un second Pierre et Vacances laisse deux clans irréductibles de pour et de contre dans la commune. "Ce projet m'intéressait, mais pas en ce lieu", commente le maire. "Nous sommes proches de la saturation en urbanisme dans la presqu'île. L'assiette est pleine", ajoute-t-il. Autre projet cher à l'ancien maire, mais toujours député et président du Syndicat d'initiative Léonce Deprez, le port de plaisance Port-Touquet. Une fondation soutenue notamment par l'un des frères associés dans l'hôtel Westminster, Hubert Flament, mais en tant que président du centre nautique de la ville. "Une idée dans l'air depuis le début du siècle, répond Philippe Cotrel. Mais le coût est déraisonnable (150 MF) et il existe un port en eau profonde dans le port de pêche voisin d'Etaple dont il faut améliorer les possibilités d'accueil."

Le Touquet ne renonce pas pour autant à investir. L'étude Horwath avait mis en évidence le caractère vieillissant du centre de congrès, le Palais de l'Europe. Mais le devis de modernisation était jugé trop lourd (25 MF). Le projet a été totalement refondu. Des travaux ont débuté pour quatre mois en janvier. Pour 14,5 MF, Jérôme Lebrec annonce des locaux plus fonctionnels, neuf salles de sous-commission de 20 à 200 personnes de capacité. Coeur de cible : le congrès de 200 à 500 personnes. La ville, par ailleurs, fera ce qu'elle doit en matière d'entretien et de nécessaire modernisation, mais restera économe.

Elle favorisera un investissement privé ciblé. Le Touquet se réjouit des investissements considérables réalisés récemment par les deux casinos de la ville, l'un appartenant au groupe Partouche, l'autre au Britannique Aspinall's.

Côté hôtellerie (lire l'encadré), le maire est clair : "1.220 chambres, c'est énorme. Il ne faudrait pas aller plus haut, mais mieux vendre. Des hôtels en difficulté, c'est une mauvaise image pour la ville". Avec l'aide de la CCI de Boulogne-sur-Mer/Montreuil, Le Touquet encourage les professionnels à s'organiser pour un meilleur dialogue avec la station. C'est chose faite avec le "club Partenaires" informel qui regroupe les 3 et 4 étoiles et avec le tout nouveau club 2 étoiles. L'objectif numéro un commun à la station et aux hôteliers est le développement des congrès à partir de mai prochain. Cette année apportera une nouveauté avec les "Jeux mondiaux de la médecine", un symposium médical agrémenté de sport du 28 juin au 6 juillet.

Que sera la politique de création d'événements ? Sur la lancée de l'action de Léonce Deprez, Le Touquet accueille environ un événement important par mois, de succès variable. Jérôme Lebrec indique qu'un audit qualité et rapport qualité/prix sera effectué pour chacune des manifestations. Il ne paraît pas raisonnable à l'équipe actuelle d'aller plus loin en nombre d'événements, mais de sélectionner ce qui fonctionne le mieux. S'il faut créer de nouvelles manifestations, ce sera donc en remplacement de celles qui ont obtenu jusqu'à présent des résultats discutables en termes économiques et d'image.

A. Simoneau

Philippe Cotrel (à gauche), maire

du Touquet et Jérôme Lebrec,

directeur de station : Objectifs :
gérer au plus près, sélectionner

les meilleures manifestations.

Pas de nouvelles chambres. Dialoguer avec des professionnels organisés.

Le Touquet, c'est une presqu'île

dans les arbres, un micro-climat

culturel, familial, sportif

et "authentique".

HOTELLERIE ET RESTAURATION : CONVALESCENCE

La restauration nombreuse et diversifiée, quelquefois accusée de prix excessifs, a connu des résultats contrastés. Décevants en saison pour le bord de mer et les alentours de la ville, difficiles, mais adaptables pour le très haut de gamme, bons pour les brasseries branchées de l'hypercentre. Les restaurateurs jouent les premiers rôles dans l'association de commerçants créée début décembre 1996 sous la présidence de Guy Benhamou, patron du casino des Quatre Saisons. Une association d'abord créée pour se faire entendre de la station.

L'hôtellerie s'est adaptée à la crise surcapacitaire et va un peu mieux. Les 4 étoiles augmentent leur taux d'occupation sur 1995 de 5,84 points à 51,78%. Pas encore de quoi pavoiser, mais les hôtels Holiday Inn et Grand Hôtel Park Plaza sont à présent en bonnes mains avec une charge fixe très abaissée. Philippe Flament, directeur du Westminster, le plus ancien des 4 étoiles, estime la communication bien meilleure à présent entre les directions des hôtels concurrents. Les 3 étoiles n'ont jamais connu la même crise (61,73% de TO en 1996 en baisse de 0,60%), mais souffrent quand même du poids des 4 étoiles. Le club des Partenaires permet de partager les frais de salons, d'éductours, d'accueil des journalistes. Les 2 étoiles ne se portent pas trop mal à 58,55% (+ 1,66%). Ils souffraient d'être méconnus. Un club les réunit depuis décembre dernier avec la bénédiction de la station et de la CCIBM. La totalité des seize 2 étoiles de la ville est inscrite au club, soit 560 chambres. Si l'on en retire deux résidences hôtelières qui comptent 210 chambres, restent 14 hôtels de tourisme pour 350 chambres. Ces petits établissements avec ou sans restaurant ont leur clientèle souvent fidèle, mais doivent se faire connaître à l'extérieur. Ils vont donc organiser ensemble leur promotion, choisir leurs salons, vendre à forfait des produits à thème, établir une intention d'accueil assortie d'une Charte de qualité, construire une image commune, éditer une plaquette et travailler plus près de la station. Le président est Frédéric Jaunault (Le Chalet), le vice-président Jacques Coyot (l'Armide).

NOTORIÉTÉ ET FORTE IMAGE,

DECLIN ET PROGRES

Selon une étude de positionnement concurrentiel réalisée par Horwath il y a deux ans, Le Touquet bénéficie d'une bonne notoriété chez

les professionnels

du voyage. Derrière les vedettes comme Deauville ou Cannes, la station se situe entre 75 et 90% de taux de reconnaissance aux côtés de Saint-Malo,

La Baule ou Biarritz.

Le Touquet est programmé par 56% des professionnels interrogés bien avant Brighton (15%) ou Vichy (17%) pratiquement sur la même ligne que sa concurrente La

Baule (50%), mais derrière Cannes (65%), Deauville (63%), Biarritz (58%). En raison probablement de son rapport qualité/prix, Le Touquet est en tête des stations recommandées par les prescripteurs (90%). L'image
de la station est jugée "forte" par 51% des personnes interrogées pour son potentiel événementiel et médiatique. Mais si 19% lui attribuent une image "montante", 30% la perçoivent encore comme une destination en déclin. La direction de la station en déduit donc que sa politique de communication peut être améliorée.

PROVENANCE DE LA CLIENTELE DANS LES HOTELS
DU TOUQUET
Hôtels 4* Hôtels 3* Hôtels 2*
France 62,67% 42,89% 59,43%
Grande-Bretagne 28,17% 40,35% 33,04%
Belgique 3,80% 6,90% 4,38%
Allemagne 1,53% 3,48% 1,46%
Pays-Bas 0,83% 2,49% 1,30%
Autre 3,0% 3,89% 0,39%

EVOLUTION DES TAUX D'OCCUPATION (DU 1ER JANVIER AU 31 OCTOBRE 1996)

19951996



L'HÔTELLERIE n° 2495 Hebdo 30 janvier 1997

L'Application du journal L'Hôtellerie Restauration
Articles les plus lus...
 1.
 2.
 3.
 4.
 5.
Le journal L'Hôtellerie Restauration

Le magazine L'Hôtellerie Restauration