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Quand le Palais de Justice concurrence le Café du Palais

Depuis cinq ans, un distributeur de boissons est à la disposition des centaines de personnes qui passent, chaque jour ouvrable, dans la salle des pas perdus du Palais de Justice de Quimper : café, thé, chocolat, coca, soda, dans un gobelet de plastique blanc.

Est-ce de la concurrence déloyale ? Oui, estime Christiane Villard qui exploite depuis neuf ans un débit de boissons à l'enseigne du Café du Palais. «J'ai une clientèle de quartier, bien sûr, mais le plus gros de ma recette, je le réalise avec les gens qui fréquentent le Palais de Justice. Avec l'installation d'un distributeur de boissons, dans la salle des pas perdus, j'ai perdu 40% de mon chiffre d'affaires. J'ai mis des années à compenser cette perte par le gain d'une clientèle nouvelle. Le comble, c'est que des gens viennent chez moi chercher de la monnaie pour le distributeur.»

Mme Villard a demandé au Syndicat de l'hôtellerie du Finistère d'intervenir pour concurrence déloyale. «Le syndicat s'est contenté d'une simple lettre au président du Tribunal de grande instance. Elle est évidemment restée sans suite et j'ai démissionné du syndicat.» Depuis, Mme Villard a écrit elle-même au président du tribunal : «Ce distributeur à la disposition du public constitue pour moi une injustice.» Elle obtient un rendez-vous. «Je suis très ennuyé que cet appareil soit la cause d'une baisse de votre chiffre d'affaires, mais je ne suis pas le seul à décider. Ecrivez-moi tout ça», répond le magistrat. C'était en janvier dernier.

Le tribunal regrette

En avril, arrive un courrier à en-tête du Tribunal de grande instance signé du président : «Je ne puis envisager de dispositif spécifique compte tenu de la distribution des locaux du tribunal. Le distributeur doit être accessible à l'ensemble du personnel du Palais (avocats, huissiers, éducateurs, gendarmes, policiers...). Par ailleurs, la confusion que font certains de vos clients procède également de votre enseigne «Café du Palais» que vous avez librement choisie. Il n'est pas contestable que la proximité du tribunal vous fait bénéficier d'un certain nombre de chalands. Je vous rappelle que tout établissement public est habilité à utiliser un distributeur de boissons non alcoolisées, même à usage du public. Regrettant de ne pouvoir donner suite à votre requête...»

Christiane Villard juge l'injustice d'autant plus grande que ce fonds de commerce appartenait à un avoué qui l'a vendu à un sieur Bureller à condition qu'il en fasse un débit de boissons. En effet, le quartier du Palais en manquait. C'était en 1881. Depuis, il a toujours été un café, sans doute le plus vieux de Quimper. Un café pittoresque où les avocats avaient leur petite salle avec entrée indépendante. Ils l'appelaient la Vème chambre !

A. de Sigoyer

A l'angle de la rue du Palais,

le petit café existe depuis 115 ans.



L'HÔTELLERIE n° 2481 Hebdo 31 octobre 1996

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