Une station pyrénéenne sur la voie du renouveau
Il y a quelques mois, lors d'une conférence de presse à Toulouse, René Rettig, le nouveau maire de la station, avait clairement annoncé la couleur: «Luchon est en réanimation, parce qu'elle n'est pas en bonne santé. On ne peut plus investir inconsidérément comme avant. Nous devons trouver de nouvelles voies de développement. Le thermalisme subit la baisse générale ; en ski, les résultats sont déficitaires en raison d'une mauvaise gestion du parc immobilier.» C'est à peu près le même langage que le maire tient aujourd'hui. En y ajoutant plus d'optimisme.
Certes, les grands problèmes ne sont pas résolus. Superbagnères, la station d'hiver, est restée soumise aux caprices de la météo, même si cette année, il y a eu plus de neige. Le «Grand Hôtel», loué par le Club Méditerranée, ne rapporte rien car la commune de Luchon doit payer jusqu'en 2005 de lourds emprunts pour des travaux de rénovation qui avaient été jugés par certains comme irréalistes. Le thermalisme a accueilli 22.746 curistes en 1995 et annonce un chiffre d'affaires de 55 MF. Un thermalisme mal conçu, selon René Rettig (qui est, par ailleurs, directeur général des hôpitaux de Toulouse) : «Les investissements avaient été faits principalement pour la rhumatologie. On a trop perdu de clients en ORL, spécialité qui est la plus demandée. L'établissement thermal n'a pas été fait comme il aurait dû l'être.»
La commune (3.300 habitants permanents et 20.000 résidents en saison) gère un budget important, de l'ordre de 140 MF, dont 33 MF, seulement, pour les investissements. Ici, en effet, ce qui coûte cher, c'est le personnel municipal, jugé parfois pléthorique.
«Le développement du tourisme, et donc de la commune, passe par l'effort des Luchonnais. Que tout le monde s'unisse, les commerçants et tous les autres. La station a une place éminente dans le tourisme pyrénéen. Nous devons trouver nous-mêmes nos propres forces pour rester à la hauteur de notre ancienne réputation. Nous allons lancer tous ensemble un programme d'action qualité.» Union, René Rettig croit ferme à ce mot. Il ne faudrait pas de toute manière laisser passer la chance, à l'heure où les Pyrénées élaborent une grande charte de développement.
Dans cette recherche de synergie, la profession hôtelière paraît donner le bon exemple. Cela mérite d'être souligné. Le président des hôteliers locaux, Maurice Candel (Hôtel Corneille, le seul 3 étoiles de Luchon), se plaît à le dire: «Nous sommes arrivés à nous mobiliser largement, même si notre unité n'est pas encore parfaite et s'il y a des passéistes. La profession cultive de très bonnes relations avec la mairie et l'office de tourisme.» Intra-muros, Luchon compte 36 hôtels-restaurants et 3 hôtels sans restaurants ; 8 en dehors ; plus une vingtaine de restaurants. Un parc qui pourrait être rentable s'il n'y avait un bon millier d'appartements ou de villas à louer. Une cause de surcapacité qui a entraîné le vieillissement de la plupart des établissements et la difficulté pour un certain nombre de se moderniser.
Quoiqu'il en soit, le renversement de la situation est tangible. Les bienfaits de l'action commune commencent à se faire sentir. Ainsi, hôteliers, commerçants, artisans, professions libérales mettent la main à la pâte pour monter des programmes d'animation, comme, dans la première quinzaine de juillet, l'opération «Ville gourmande», durant laquelle une trentaine de restaurateurs, cafetiers et professionnels des métiers de bouche ont invité les touristes et les curistes à un voyage gastronomique pour tous les goûts. Et cela, bien entendu, avec le concours direct de la mairie. Maurice Candel y reconnaît «le début d'une belle unité entre les forces vives du commerce».
L'animation et la vie culturelle de Luchon ne s'arrêtent pas à la table. Nombreuses sont les manifestations en tous genres qui égayent l'été : festival de musique, concours hippique, fête des fleurs (une grande tradition, toujours le premier dimanche d'août), un championnat de vol à voile, ou une rencontre du chant pyrénéen. Au coeur de cette animation permanente figure l'office de tourisme. Jean-Paul Vassort, son directeur, ne ménage pas sa peine pour sortir Luchon de sa période de réanimation : «Dans une conjoncture économique difficile, il faut prendre des parts de clientèle. L'office de tourisme est avant tout un outil commercial. Il gère 1.500 appartements, il apporte son appui technique à l'hôtellerie (il s'emploie, par exemple à convaincre chaque hôtel d'avoir une ou deux chambres aux normes anti-allergiques). Dans notre étude des clientèles, nous réfléchissons à de nouveaux produits. Notre hôtellerie était devenue vétuste ; elle se refait petit à petit. L'animation devenait ringarde ; l'événementiel est à créer.» On peut citer, à ce titre, la candidature de Luchon-Superbagnères à l'organisation d'une étape de la coupe du monde de ski, pour rappeler que la station est l'une des plus anciennes de France. La «Reine des Pyrénées» est bien en train de retrouver son souffle.
Texte et photos
J.-C. Cougoule
La construction d'un hôtel-restaurant de standing est en projet dans
le parc du casino
de Luchon. Elle s'inscrirait dans
le cadre de la
rénovation générale de l'établissement qui, lui aussi, a bien vieilli et n'a dû
qu'à l'arrivée des machines à sous de se refaire une santé.
Dirigé depuis 1983 par Francis Guyraud (également
actionnaire du
casino de Salies-du-Salat, toujours en Haute-Garonne),
le casino de Luchon fonctionne
300 jours par an et enregistre 50.000 entrées.
Outre les machines à sous, il ne possède qu'une boule et
un cabaret de style rétro avec son orchestre propre. Son chiffre d'affaires est de 7 MF. Il devrait être
prochainement doté d'une salle de
roulette et de
black-jack.
L'établissement
reste l'un des
éléments moteurs de l'animation
de la station.
René Rettig, maire de Luchon depuis 1995. Pour faire retrouver à la station son lustre d'antan, il prêche la rigueur de gestion et l'unité de toutes les forces vives.
Francis Guyraud, directeur
du casino. Sauvé, comme tous ses confrères, par les machines à sous, il veut aujourd'hui redonner de
nouvelles couleurs à l'établissement.
Maurice Candel, président
du syndicat de l'hôtellerie luchonnaise. Convaincu
des vertus de la synergie,
il a l'appui de la mairie.
L'HÔTELLERIE n° 2468 Hebdo 25 juillet 1996