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Actualité juridique
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Vente d'une société hôtelière

Qu'est-ce que la garantie d'actif et de passif

Vous avez décidé de vendre votre société qui exploite un fonds de commerce d'hôtellerie, trouvé l'acheteur providentiel et son prix vous convient. C'est bien, mais c'est insuffisant. Ne croyez pas que lorsque vous aurez encaissé le prix de la vente, vous serez dégagé de toute obligation vis-à-vis de cet acheteur.

En effet, l'acheteur risque fort de vous demander, comme c'est l'usage, de lui consentir, le jour de la vente, une garantie portant sur l'actif et le passif de votre société.
Ainsi, dans le cadre d'une convention, le plus souvent intitulée 'Convention de garantie d'actif et de passif', et signée par les deux parties, le vendeur effectue, au profit de l'acheteur, différentes déclarations portant sur la situation de la société vendue, sur celle du fonds de commerce exploité par la société et sur celle des titres (parts ou actions) vendus. Cette convention permet à l'acheteur d'acquérir l'établissement en pleine connaissance de cause, et au vendeur de ne pas être poursuivi par l'acheteur pour des faits dont il a été clairement informé (exemple : existence d'un procès contre un ancien salarié, travaux à effectuer...) et qu'il aura expressément exclu du cadre de la garantie.
Ces déclarations sont principalement d'ordre juridique (conformité de la société à la loi, existence de cautions, de nantissements ou de garanties, relations avec le bailleur, litiges en cours...), d'ordre administratif et réglementaire (conformité de l'hôtel aux normes en vigueur...), d'ordre commercial (contrats avec les fournisseurs, liens avec des tour-opérateurs...), ou encore, d'ordre fiscal et social (déclarations fiscales et sociales régulièrement effectuées, impôts régulièrement payés...).
Les déclarations portent également sur le descriptif et la consistance du fonds de commerce exploité par la société cédée : origine de propriété, enseigne, clientèle, droit au bail, matériel et mobilier, nantissements, chiffres d'affaires et résultats, nombre de chambres, catégorie...
Enfin, le vendeur garantira à son acheteur l'exactitude des postes du bilan de la société qui, le plus souvent, auront servi de base à la fixation du prix de cession.
A ce sujet, il est prudent de demander au vendeur la certification du bilan par l'expert-comptable de la société lorsqu'elle n'a pas de commissaire aux comptes.

Garantie qui peut donner lieu à indemnisation
Dans le même acte, le vendeur s'engagera à indemniser l'acheteur (ou la société objet de la vente selon les cas) de toute diminution d'actif, ou de tout passif supplémentaire qui serait mis à la charge de la société cédée, postérieurement à la cession, et qui résulterait notamment :
w d'une dette, autre que celle figurant dans le bilan de la société, et qui serait la conséquence d'un fait ou d'un acte antérieur à la cession ;
w d'un complément d'impôt mis à la charge de la société, après la vente, et découlant d'un contrôle fiscal qui trouverait son origine dans des faits antérieurs à la vente.
Par exemple : la vente de la société est intervenue le 1er janvier 2001. Un contrôle fiscal, portant sur les comptes 2000 de la société, intervient en juin 2001 et un redressement est notifié à celle-ci en octobre 2001.
Bien que notifiées à la société postérieurement à la vente, les conséquences financières du redressement seront, du fait de la garantie, supportées par le vendeur.
w d'une erreur ou d'un oubli dans les déclarations effectuées par le vendeur.
Par exemple : le vendeur a 'oublié' de déclarer à l'acheteur que la société était, antérieurement à la vente, poursuivie par un ancien salarié devant le conseil de prud'hommes, à la suite de son licenciement, et n'a pas inscrit de provision à son bilan relativement à cette procédure. Dès lors, le vendeur sera contraint de garantir son acheteur de toute condamnation qui pourrait être prononcée par le conseil de prud'hommes à l'encontre de la société, postérieurement à la vente.
Il est donc recommandé de porter la plus grande attention à l'élaboration de ces déclarations, comme à celle de l'ensemble de la convention de garantie d'actif et de passif et de ne pas hésiter à se faire assister, à cette occasion, par un professionnel.

Une garantie limitée dans le temps
La garantie d'actif et de passif sera valable pour une durée limitée dans le temps, cette durée étant fixée d'un commun accord entre l'acheteur et le vendeur.
La garantie d'actif et de passif visant, en grande partie, à prémunir l'acheteur contre des risques de nature fiscale, il est conseillé à celui-ci de s'assurer que la durée de la garantie est au moins égale à celle des prescriptions fiscales. Dans la pratique, le délai de trois ans, plus l'année en cours, sont souvent retenus par les parties.

Une garantie qui peut être plafonnée
Par ailleurs, le montant de cette garantie pourra être plafonné à une somme qui résultera également d'une négociation entre l'acheteur et le vendeur. Cette négociation tiendra notamment compte du prix de cession, de la situation de la société, mais également des risques à venir potentiels. En effet, le risque fiscal n'est pas le même selon que le dernier contrôle fiscal de la société remonte à dix ans ou à six mois... Enfin, pour se prémunir contre le risque d'insolvabilité de son 'vendeur garant', l'acheteur pourra demander à celui-ci de lui fournir une caution bancaire. Cette caution, dont le montant sera négocié par les parties lors de l'élaboration de la convention de garantie d'actif et de passif, sera actionnée par l'acheteur si le vendeur était défaillant en cas de mise en jeu de ladite garantie.

Garantie spécifique à l'hôtellerie
Au-delà de l'examen de la situation générale de la société et de son fonds de commerce, tel qu'évoqué ci-dessus, il est conseillé de porter une attention particulière, notamment aux points suivants, spécifiques à l'hôtellerie :
w Classement de l'hôtel : catégorie (tourisme, meublé...), nombre d'étoiles, normes et vérification de l'existence d'éventuels avis, notamment de la préfecture, tendant au déclassement de l'hôtel ou à l'exécution de travaux en vue du la conservation de sa classification.
w Vérification du registre de sécurité de l'hôtel et du respect des recommandations qui y sont effectuées par les organismes de contrôle, ainsi que de la conformité de l'hôtel à la réglementation en vigueur, principalement en matière de sécurité, d'incendie, de salubrité et d'hygiène. En cas de doute sur un de ces points, il est conseillé, dans l'intérêt de l'acheteur comme du vendeur, de faire procéder à une expertise de l'hôtel par un organisme agréé, dont le rapport sera annexé à la convention de garantie d'actif et de passif.
w Fonctionnement et état du matériel et mobilier et conformité de ceux-ci aux normes en vigueur.
w Examen du récépissé de déclaration émanant de la préfecture ('carton jaune') : une attention particulière sera portée au nombre de chambres et d'occupants autorisés par chambre agréée ou tolérée (signalée par la lettre T ou D), sachant que ces tolérances sont, par définition, toujours susceptibles d'être remises en cause.
w Il est important de s'assurer de l'absence d'amiante, de termites ou autres insectes xylophages ou de parasites, ou encore de plomb, dans l'im-meuble où est exploité l'hôtel. Une fois encore, il est conseillé d'avoir recours à un organisme agréé, dont le rapport d'expertise sera annexé à la convention de garantie d'actif et de passif.
w Absence de condamnation du vendeur, notamment pour infraction à la législation en matière de proxénétisme, de police, de voirie ou d'hygiène.
w Existence (ou non) d'une licence de débit de boissons, exploitée de façon constante et régulière.
w Absence de violation des clauses et conditions du bail par le vendeur, susceptible de permettre au bailleur de refuser le renouvellement dudit bail à son échéance, sans payer d'indemnité d'éviction, ou encore d'obtenir sa résiliation en cours de bail.
w Souscription par le vendeur des assurances nécessaires et suffisantes pour assumer la protection de l'hôtel et couvrir les risques liés à son activité jusqu'au jour de la vente.
w Vérification des contrats de travail en cours.
w Relativement à l'immeuble dans lequel est exploité l'hôtel, il convient de vérifier en demandant au vendeur la communication d'un certificat d'urbanisme que celui-ci n'est pas soumis à des servitudes ou à des prescriptions administratives (arrêté de péril, zone à urbaniser en priorité, déclaration d'utilité publique...) de nature à remettre en cause la bonne exploitation de l'hôtel.

Mise en œuvre de la garantie par l'acheteur
w L'acheteur devra aviser le vendeur, en principe par lettre AR, des faits susceptibles d'entraîner l'application de la garantie, dès qu'il en aura connaissance, en joignant à son courrier l'en-semble des pièces et éléments justifiant de sa réclamation.
w Si la réclamation est justifiée, le vendeur versera à l'acheteur la somme nécessaire pour l'indemniser des conséquences de l'augmentation de passif ou de l'insuffisance d'actif invoquée par celui-ci. Les parties pourront prévoir que cette somme sera diminuée de l'incidence effective de l'événement donnant lieu à l'indemnisation sur l'impôt sur les sociétés. De même, la convention de garantie d'actif et de passif pourra prévoir que le vendeur aura le droit de compenser, avec les sommes éventuellement dues au titre de cette garantie, tout supplément d'actif ou toute diminution de passif qui se révélerait postérieurement à la cession.
w En cas de litige entre l'acheteur et le vendeur sur l'interprétation ou sur l'exécution de la convention de garantie d'actif et de passif, ils pourront soumettre leur différend, en fonction de ce qu'ils auront prévu dans cette convention, soit aux tribunaux compétents (tribunal de grande instance ou tribunal de commerce selon les cas), soit à des arbitres désignés à cet effet. Chaque société ayant ses propres particularités, il est impossible de dresser, ici, la liste exhaustive des vérifications et déclarations à effectuer dans le cadre de l'élaboration d'une convention de garantie d'actif et de passif. Dès lors, il est recommandé à l'acheteur de ne pas hésiter à poser à son vendeur toutes les questions que lui inspire la situation de la société, et au vendeur d'être le plus complet possible dans la description qu'il fait de sa société. La réussite de la vente est à ce prix.
A. Bruguière
Avocat au barreau de Paris


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L'HÔTELLERIE n° 2709 Hebdo 15 Mars 2001


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