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Difficultés à payer votre loyer commercial ?

Vous devez réagir au plus vite

Le non-paiement du loyer peut entraîner la résiliation du bail et, par conséquent, la perte de votre commerce. Si vous avez des difficultés à régler votre loyer, la pire des choses est de ne rien faire. Vous devez réagir soit en demandant des délais à votre propriétaire, soit en utilisant les possibilités prévues par la loi.

Face à des loyers impayés, le propriétaire a la possibilité d'introduire une action en justice pour non-respect des clauses du bail, c'est-à-dire pour non-paiement de loyer, et de demander la résiliation du bail. La perte du bail entraînera nécessairement la disparition du fonds de commerce. C'est la raison pour laquelle le locataire n'a pas intérêt à pratiquer la politique de l'autruche, mais doit au contraire trouver rapidement des solutions. La première démarche à effectuer consiste tout simplement à demander des délais à son propriétaire.

Négociez à l'amiable
Avant tout incident de paiement, vous devez prendre l'initiative de contacter directement le bailleur, afin de lui faire part de vos difficultés et lui proposer des solutions qui soient acceptables :
* franchise totale ou partielle d'un ou plusieurs termes de loyer, report ou échelonnement de ces termes ;
* diminution provisoire ou définitive du loyer.
Il est recommandé d'entreprendre cette négociation par écrit. Tous les échanges verbaux par téléphone ou en personne doivent être confirmés par un courrier rappelant le point évoqué au cours de l'entretien.

Exemple :

"Pour faire suite à notre conversation téléphonique (ou notre rendez-vous du...), je vous confirme que..."

Dans un premier temps, il est préférable que la négociation ait lieu directement entre le locataire et son propriétaire, sans l'intervention d'un conseil professionnel. Ce dernier intervient ensuite pour mettre en forme et finaliser les accords éventuellement pris.
Il est bien évident que le succès de cette démarche dépendra de l'antériorité et de la qualité des relations contractuelles, ainsi que
de la situation financière respective des deux parties.

Si cette négociation échoue, vous pouvez alors demander un règlement amiable devant le tribunal de commerce.

Demandez un règlement amiable devant le tribunal de commerce
Le règlement a été instauré par la loi du 1er mars 1984 (relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises).
Cette loi, concernant le règlement amiable, a été récemment modifiée par une loi du 10 juin 1994, qui en fait une véritable procédure.
Ce règlement amiable n'est pas uniquement destiné à régler un conflit entre le locataire et le bailleur, mais de façon plus générale, de trouver des accords avec l'ensemble des créanciers de l'entreprise, lorsque celle-ci éprouve des difficultés juridiques, économiques ou financières, ou lorsque ses besoins ne sont pas couverts par un financement adapté.
La mise en œuvre du règlement amiable est faite par le représentant légal de l'entreprise sous forme d'une requête adressée au président du tribunal de commerce.
La demande expose les difficultés juridiques, économiques ou financières qui la motivent, les mesures de redressement envisagées, ainsi que les délais de paiement ou les remises de dette qui permettraient la mise en œuvre de ces mesures.

Cette demande doit être accompagnée des documents suivants :
1. un plan de financement prévisionnel et un compte de résultat prévisionnel ;
2. l'état des créances et des dettes, accompagné d'un échéancier, ainsi que la liste des principaux créanciers ;
3. l'état actif et passif des sûretés, ainsi que celui des engagements hors bilan.
4. les comptes annuels, le tableau de financement, ainsi que la situation de l'actif réalisable et disponible, valeur d'exploitation exclue, et du passif exigible des trois derniers exercices si ces documents ont été établis.

Le président du tribunal doit dans un délai d'un mois, à compter du dépôt de la requête, nommer un conciliateur (à défaut, la demande est réputée rejetée).
Le rôle du conciliateur est de favoriser le fonctionnement de l'entreprise et de rechercher la conclusion d'un accord avec les créanciers de celle-ci. Le conciliateur a également la possibilité de saisir le président du tribunal d'une demande de suspension provisoire des poursuites, pendant une durée maximale de quatre mois.
Cette mesure suspend ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers, dont la créance a une origine antérieure à cette mesure, et tendant soit à une condamnation à paiement, soit à la résiliation d'un contrat pour défaut de paiement.
Lorsque le conciliateur parvient à un accord amiable avec tout ou partie des créanciers de l'entreprise, cet accord est constaté dans un écrit qui doit être, dans certains cas, homologué par le président du tribunal.
Le règlement amiable est confidentiel, et afin d'assurer cette confidentialité, toutes les personnes qui sont appelées au règlement amiable (les créanciers notamment), ou qui par leur fonction en ont connaissance, sont astreintes au secret professionnel sous peine de sanctions pénales.

Pensez à l'action en révision du loyer
Elle est prévue par l'article 27 du décret du 30 septembre 1953 (réglementant les baux commerciaux). Mais cette action n'est possible qu'au moment d'une révision triennale du loyer.
Le principe est que la révision du loyer doit être calculée en fonction de la variation de l'indice Insee du coût de la construction. Une révision du loyer à la baisse sera difficile à obtenir, dans la mesure où le locataire devra démontrer, pièces ou justificatifs à l'appui, une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité, ayant entraîné par elle-même une variation de plus de 10 % de la valeur locative.
On rappellera qu'aux termes de l'article 23-4 "les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée, et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire".
Compte tenu des conditions auxquelles elle est soumise, et de sa durée, cette action ne peut bien entendu pas pallier les difficultés pressantes de règlement du loyer.

Il est possible de demander des délais au juge
A défaut de règlement d'un ou plusieurs termes de loyer, le bailleur va faire délivrer à son locataire, par exploit d'huissier, un commandement de payer visant la clause résolutoire contenue dans le bail.
A compter de cette signification, le locataire dispose d'un délai de 1 mois pour régulariser la situation en réglant les arriérés.
Si tel n'est pas le cas, le bailleur est fondé à assigner son locataire en référé devant le président du tribunal de grande instance, pour qu'il constate la résiliation du bail et ordonne l'expulsion du locataire. Avant l'expiration de ce délai de 1 mois, le locataire peut lui aussi prendre l'initiative de saisir en référé le président du tribunal de grande instance afin de solliciter des délais de règlement.
Cette faculté est prévue par l'article 1244 du Code civil, auquel renvoie également l'article 25 du décret de 1953. Le juge peut accorder au maximum 2 ans de délai mais, en pratique, le délai accordé par le magistrat se situe le plus souvent dans une fourchette de 6 mois à 1 an.
Le délai consenti s'applique uniquement aux arriérés de loyers, mais pas aux loyers en cours dont le règlement doit se poursuivre aux échéances normales.
Pendant le délai accordé, le locataire devra donc payer, outre le loyer normal, la régularisation des loyers arriérés. L'ordonnance rendue par le juge prévoit le plus souvent une simple suspension des effets de la clause résolutoire. Ce qui signifie que, si le locataire ne paye pas un seul loyer, le bail sera résilié de plein droit. Cette demande de délai doit être justifiée par des pièces. Elle sera admise si le locataire apporte la preuve qu'il ne s'agit que de difficultés structurelles, ponctuelles ou provisoires. En revanche, des délais ne devraient pas être accordés si l'entreprise est en déficit chronique depuis plusieurs années, ou si l'état des inscriptions fait apparaître des inscriptions prises au profit du Trésor public ou d'organismes sociaux, révélant des défauts ou retards de paiement d'impôt et de cotisations sociales, anciens et répétés.
Cette demande de délai peut également être sollicitée devant le juge et obtenue, dans le cadre de l'assignation en référé expulsion, introduite par le bailleur, lorsque, passé le délai de 1 mois, le locataire n'a pas réglé les arriérés de loyers.
Il est bien entendu préférable de prendre l'initiative de demander des délais, plutôt que d'attendre d'être assigné en expulsion pour le faire.
E. Duroux
(Avocat au barreau de Paris)

La première démarche à effectuer consiste tout simplement à demander des délais à son propriétaire

Le dépôt de bilan à utiliser en dernier recours

En dernier ressort, le dépôt de bilan constitue la solution ultime pour faire face à des difficultés de règlement du loyer.
Là encore, il faudra que les difficultés soient simplement d'ordre conjoncturel. En effet, si la situation financière apparaît irrémédiablement compromise, le tribunal de commerce prononcera la liquidation judiciaire pure et simple, soit immédiatement, soit à bref délai.
Il est impératif que le jugement de redressement, rendu par le tribunal de commerce, intervienne avant qu'une décision constatant ou prononçant la résiliation du bail ne soit devenue définitive.
L'article 36 du décret du 30 septembre 1953 et l'article 37 de la loi du 28 janvier 1985 (relative au redressement et à la liquidation judiciaire) prévoient que l'ouverture d'une procédure collective n'entraîne pas la résiliation de plein droit des contrats (notamment du bail commercial).
L'article 47 de la loi de 1985 prévoit, quant à lui, la suspension des poursuites pour les créances antérieures au jugement, c'est-à-dire
'un gel' des dettes nées avant le dépôt de bilan.

Dans le cas d'un redressement judiciaire avec poursuite d'activité, seuls les arriérés de loyer dus antérieurement au jugement de redressement sont concernés. Les loyers postérieurs devront être payés aux échéances prévues.
A défaut, le bailleur sera en droit de faire délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire à l'administrateur judiciaire ès qualités et l'assigner en résiliation du bail.
Si la poursuite de l'activité s'effectue dans de bonnes conditions, le redressement judiciaire pourra s'orienter ensuite soit vers la
préparation et l'homologation d'un plan de continuation, soit vers un plan de cession du fonds de commerce.


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L'HÔTELLERIE n° 2693 Hebdo 23 Novembre 2000


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