Quelles sont les réponses de Bruno Le Maire aux grandes problématiques de l'hôtellerie et de la restauration ?

Publié le 15 novembre 2016 à 11:28

Comme vous le savez, la profession s'élève contre les dérives de l'économie dite collaborative. Est-ce normal, qu'à activité similaire, les règles varient ? Les avancées qui ont eu lieu ne sont pas suffisantes. Quelles mesures mettrez-vous en place pour que les hôteliers, comme les restaurateurs, puissent travailler à « armes égales » ?
Bruno Le Maire : Il est essentiel que les professionnels du tourisme, qui doivent investir souvent lourdement pour moderniser leurs équipements puissent bénéficier de conditions économiques équitables avec les plateformes internet. Les évolutions de mode de vie des Français doivent être accompagnées et il n'est pas question d'interdire qu'un particulier puisse louer de temps en temps sa résidence principale pour compléter ses revenus par exemple. En revanche, il faudra aller plus loin que ce qui est fait aujourd'hui et obliger les sites de meublés touristiques à déclarer aux services fiscaux ainsi qu'aux communes concernées les loueurs ayant recours à leur plateforme. Si la croissance de cette activité ne doit pas être entravée (150 000 annonces en 2015 contre 7 000 en 2012), un cadre doit être fixé pour éviter les abus et les distorsions de concurrence.

Le tourisme est reconnu depuis peu comme un secteur économique à part entière. Quelle place, quel 'ministère' doit-on lui accorder selon vous et pourquoi ?
Il est objectivement trop tôt pour aborder dans le détail l'architecture gouvernementale de 2017. Je souhaite un gouvernement resserré pour plus d'efficacité et de cohésion. Ce qui est certain, c'est que le tourisme pèse de plus en plus lourd dans l'économie française et doit être considéré comme une industrie à part entière au sens noble du terme. Par ses impacts bénéfiques transverses avec de nombreux autres secteurs économiques (construction, agriculture, sport, culture, numérique…) le tourisme devra pouvoir bénéficier d'arbitrages interministériels suivis au plus haut niveau.  

L'Umih, qui est le plus important syndicat patronal, a dénombré que des centaines de normes et de règlements s'appliquaient aux entreprises de l'hôtellerie et de la restauration,  dont 90% emploient moins de 8 salariés. 50 nouvelles réglementations tombent tous les ans, soit environ 150 gestes nouveaux pour l'exploitant. Votre sentiment ?
Le secteur de la Restauration et de l'hôtellerie souffre comme de très nombreux autres secteurs dans notre pays (agriculteurs, artisans, bâtiment…) d'un excès ahurissant de normes.  Il faut désormais en finir. Je propose d'appliquer à l'administration des contraintes qui la forcent à réfléchir aux implications de ce qu'elle décide souvent pour se protéger elle-même. Nous instaurerons donc la suppression préalable de deux normes avant toute création d'une nouvelle. Dans le cas contraire, cette norme pourra être dénoncée devant la justice.
Par ailleurs, nous proposons dans notre Contrat Présidentiel que chaque organisation professionnelle puisse définir par elle-même 10 normes qui seraient jugées inutiles ou nuisibles pour son secteur d'activité. Si dans un délai court, l'administration n'a pas justifié et prouvé l'intérêt de son maintien, le ministre en vigueur serait tenu de supprimer ces règles

Quels sont les leviers à mettre en oeuvre pour préserver et développer  les TPE et les PME qui sont vecteurs d'emplois, non délocalisables ?
La France souffre du faible emploi dans les TPE PME et de la faible capacité qu'ont ces entreprises à pouvoir se développer comme certaines le souhaiteraient. Pour que les entreprises retrouvent le goût et la capacité de croître, nous nous attaquerons à quatre grandes séries de mesure dès l'été 2017 : la première des réformes concerne le marché du travail qui sera traitée par ordonnance. Nous mettrons en place un CDI plus souple où les conditions de licenciement seront considérablement simplifiées pour casser la peur de l'embauche. Nous créerons également un Contrat à Objet Défini qui remplacera les CDD et sera également plus souple dans ses modalités de renouvellement et pourra durer jusqu'à trois ans. En contrepartie, le salarié bénéficiera d'une prime de précarité qui augmentera avec le temps et qui rendra le basculement en CDI plus intéressant pour l'employeur qui souhaite conserver ce salarié.¨Par ailleurs, les indemnités prud'homales seront plafonnées.  
Nous fluidifierons également l'offre et la demande de travail en réformant la formation initiale et la formation continue. La formation sera profondément réformée pour orienter plus fortement les fonds vers les besoins des entreprises en confiant les fonds aux régions et non plus aux syndicats. Nous revaloriserons la filière professionnelle en créant des écoles de métier gérées par les entreprises et les régions en remplacement de l'enseignement professionnel et permettrons à nos enfants dès le collège de choisir des options professionnelles avec comme objectif de permettre à chaque jeune de trouver un emploi à la sortie de son cursus scolaire. Il est vital que les entreprises puissent trouver les talents dont elles ont besoin. C'est quand même un comble de constater que ce n'est pas le cas aujourd'hui dans un pays qui compte un chômage aussi élevé.
La troisième réforme porte sur les charges et la fiscalité.  Il faut augmenter les marges des entreprises pour pouvoir leur dégager des marges de manoeuvre financières et investir. Pour cela nous basculerons totalement le CICE en baisse des charges immédiates et nous amplifierons les baisses de charges en supprimant les cotisations 1% logement et en baissant les taxes sur la formation et l'apprentissage. Nous baisserons l'impôt sur les sociétés à 30% en conservant le taux dérogatoire de 15% pour les TPE /PME. Nous garantirons enfin la stabilité sur le quinquennat des mesures prises dès l'été 2017 pour offrir de la lisibilité aux entrepreneurs.
Dernier chantier auquel nous nous attèlerons dès notre arrivée aux commandes de la France : nous accélèrerons considérablement le chantier de simplification des normes et des pratiques administratives. Ce travail est un chantier de longue haleine mais qui est crucial car il doit apporter une réponse au ras-le-bol général des Français face à la complexité croissante de notre pays. Ce chantier sera contrôlé directement depuis l'Elysée par une cellule de suivi des réformes.  Le gouvernement actuel a tellement pêché par des effets d'annonce si peu suivis d'effet! La méthode sera cruciale pour redonner de la crédibilité aux décisions politiques. Il faudra de la ténacité.  

Il existe un certain nombre de mesures qui sont utiles au secteur de l'hôtellerie et de la restauration.  Citons-en trois : Réductions Fillon, Crédit d'impôts pour les Maîtres Restaurateur et l'Aide à l'embauche dans les PME. Vont-elles perdurer ?
Tout à fait. Les réductions d'impôt seront intégrées dans la baisse totale des charges, de même que l'Aide à l'embauche des PME qui sera remplacée par une mesure encore plus généreuse. Pour créer une dynamique d'embauches dès septembre 2017, tous les recrutements effectués par une entreprise de moins de 10 salariés jusqu'à fin janvier 2018 seront totalement exonérés de charges patronales pendant un an. Le Crédit d'impôt pour les Maîtres Restaurateurs sera conservé le temps d'en faire le bilan.
Une autre de mes propositions peut être très utile pour vous restaurateurs et hôteliers qui avez des besoins en personnels faiblement qualifiés. Il s'agit des emplois-rebonds qui permettent pour un coût complet de 7€ par heure pour l'employeur de recruter une personne allocataire au RSA pendant 20 heures par semaine et pour une durée d'un an. Le salarié touchera 5€ net et continuera de bénéficier à plein de son RSA pendant ce temps. Si vous vous saisissez de cette opportunité, vous permettrez à des publics éloignés de l'emploi de retrouver un travail pour un coût par emploi qui sera très faible pour vous. Vous serez libres d'embaucher à coût modéré une, deux, trois personnes en emplois-rebonds selon la taille de votre entreprise. Les conditions de rupture seront souples et vous pourrez basculer à tout moment votre salarié en contrat de travail classique. Saisissez cette chance ! Ensemble, nous redonnerons un travail et une dignité aux personnes les plus vulnérables. C'est cela aussi l'innovation politique.

Les entreprises françaises, dans leur ensemble, réclament la stabilité fiscale. Que répondez-vous ?
Que leur demande est hautement légitime et fondée après tant d'années d'incertitudes, de modifications, de remises en cause incessantes. Nous intégrerons dans la constitution le principe de stabilité fiscale. Un impôt ne pourra être modifié (assiette et taux sauf en cas de baisse) plus d'une fois par mandat.

Y aura-t-il ou non, si vous êtes élu à la Présidence de la République, une hausse de la TVA ?
Absolument pas. Nous nous refusons à toute hausse d'impôt quelle qu'elle soit.  Après des années de matraquage fiscal, il est grand temps de cesser toute hausse fiscale et de tenir les baisses d'impôt par une réduction des dépenses publiques. Augmenter la TVA, c'est la facilité qui a conduit à tant d'erreurs politiques depuis 30 ans.

Le secteur est confronté à de multiples problèmes de trésorerie et de crédit. Le GNI, autre organisation patronale du secteur, réclame, par exemple, le rallongement des crédits bancaires (7 ans à +).  Jusqu'où un Gouvernement peut-il agir ?
Les problèmes de trésorerie se règlent à trois niveaux : en améliorant les marges des entreprises -je l'ai évoqué, en favorisant un accès plus large aux solutions de financement des entreprises. Pour cela, nous sortirons plus largement du monopole de prêt des banques (utilisation plus large des prêts inter-entreprises et des solutions de prêts participatifs).

 


Publié par Sylvie SOUBES



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