Frédéric Brouillard et Gwenaël Le Houerou (AFA) : "Le point noir pour cette année c'est l'absence de visibilité"

Frédéric Brouillard, président de l'Association des Franchisés Accor, et Gwenaël Le Houerou, vice-président, exposent les principaux points positifs (réactivité du gouvernement avec la mise en place du chômage partiel, les aides accordées pour les entreprises...) et axes d'amélioration (lourdeur administrative, absence de visibilité...) face à la crise du Covid19.

Publié le 26 février 2021 à 19:19

Quel regard portez-vous sur 2020 ?

Gwenaël Le Houerou : Tout début 2020, j’avais deux bars à vin sur Paris et j’ai un hôtel restaurant à Aix en Provence. Nous n’avons pas vécu la même chose sur les différents établissements. Pour un bar à vin restaurant, sur Paris, la situation est encore plus catastrophique. Pour ce qui est de l’hôtellerie, nous avons vécu une année très chaotique mais nous avions l’espoir de repartir en septembre. En tant qu’exploitant c’est très difficile mais aussi pour nos équipes. On se rend compte que les équipes sont à saturation d’être au chômage partiel chez eux. Ça commence à jouer sur leur moral et leurs compétences. Pour ceux qui ont fermé pendant huit mois par exemple, il va y avoir des difficultés au moment de la remise en route et des pertes de compétence. Le pire aujourd’hui, c’est l’absence de visibilité. On ne peut rien prévoir, c’est ce qu’il y a de pire pour un chef d’entreprise.

Frédéric Brouillard : J’ai plusieurs hôtels dans le Nord de la France, avec ou sans restaurant. Globalement nous sommes restés fermés que pendant tout le premier confinement. C’est compliqué et en même temps il y a des sujets à suivre comme les PGE, les discussions avec les banques pour les reports d’emprunt... Ensuite, il y a eu la fin du confinement avec la reprise d’activité. En octobre une nouvelle baisse. On n’a pas eu le temps de s’embêter mais c’est très compliqué pour faire du chiffre d’affaires. C’est compliqué aussi pour les équipes. On s’est posé beaucoup de questionnement sur l’hôtellerie. Mais finalement, plus que jamais, je crois dans le modèle de l’hôtellerie. C’est un modèle assez résilient, d’abord en province, et bientôt à Paris.

 

Comment voyez-vous l’année 2021 ?

Le point noir pour cette année c’est l’absence de visibilité. On ne peut pas se projeter, avec les collaborateurs, le recrutement, les aides... 

Deuxième point noir : la lourdeur administrative. C’est dommage, quand on voit toutes les aides mises en place, qu’on ne peut que saluer. Le fonds de solidarité pour janvier est en ligne depuis le 24 février... Ceux qui sont déjà limite ils ont déjà un mois de retard. Et au-delà de 30 000 € d’aides il y a des contrôles systématiques et forcément ça crée un retard énorme. Il y a des disfonctionnements trop importants. Par exemple, on ne peut pas contacter par mail ceux qui gèrent les aides en entreprise. Ça doit passer par le centre des impôts, qui transfère au service concerné, qui met une semaine à répondre. C’est une vraie usine à gaz. Et au lieu de poser des questions quand ils reçoivent le dossier, ils le refusent en le renvoyant, et il faut se justifier, et ça repart.

Enfin, on constate également que les banques blacklistent l’hôtellerie. Etonnant quand on sait qu’elles ne prennent que 10 % de risque, et qu’elles imposent même dans certains cas à prendre des assurances. Dans les mois qui viennent ça va causer des problèmes sur le financement de cette crise. Comment le gouvernement va accompagner le secteur pour que les notes Banque de France ne soient pas dégradées ? Comment obtenir des prêts auprès de la BPI avec des taux pas trop importants ?

 

Vous avez adressé une lettre à Bruno Le Maire, Alain Griset et Jean-Baptiste Lemoyne. Quels sont vos principales demandes ? 

Tout d’abord, il y a un vrai sujet sur les loyers, ou sur le financement des murs. Quand vous êtes propriétaires et que vous avez un crédit-bail, aujourd’hui, c’est très compliqué d’obtenir gain de cause. Quand on est locataire c’est aussi très compliqué d’obtenir des délais. Ce que le gouvernement avait imaginé avec deux mois gratuits pour le locataire et un mois exonéré d’impôt pour le propriétaire, ça n’a pas donné grand-chose.

Autre chose : on appelle à un plan de stratégie touristique 2030 en se disant qu’on va finir par sortir de cette crise et donc autant prendre l’opportunité pour définir un plan puisque la France a un potentiel important pour le tourisme d’affaires et de loisirs. On a encore des choses à faire donc autant se mettre autour de la table, et ça permettra de redynamiser les acteurs. Profitons de cette sortie de crise pour réfléchir à un nouveau tourisme d’affaires et de loisir en France et y englober tous les acteurs car derrière l’hôtellerie et la restauration il y a le transport, les producteurs… L’hôtellerie est un secteur où l’escalier social fonctionne. On est capable d’embaucher des personnes sans diplôme et de les former, les faire gagner en compétence, former sur le digital, embaucher en apprentissage. C’est important de voir l’avenir avec autre chose que des doses de vaccin et des nombres de cas.

 

Qu’attendez-vous de la part de l’Etat ?

Nous demandons de la visibilité. On ne va pas pouvoir rester encore un ou deux mois sans visibilité. On est fin février, et on n’a aucune visibilité sur l’année 2021. Ça ne va pas pouvoir durer.

Nous demandons également de la clarté et moins de lourdeur administrateur. Nous sommes vraiment conscients que Bercy fait un maximum pour nous aider, et on en est tous conscients, mais il y a des pistes d’amélioration. La mise en place des dispositifs est trop compliquée, et ça vient polluer le reste. Ce qui est compliqué c’est d’attendre deux mois pour quelque chose qu’on devrait avoir en une semaine. Et quand on parle de clarté. Prenez l’exemple de l’histoire des coûts fixes avec le nouveau dispositif d’aide de 10 millions d’euros. Quand on va regarder dans le détail pour savoir si on est concerné, on ne sait pas. Est-ce que ça nous concerne, à quelle hauteur, est-ce que ça peut nous aider pour les loyers… on ne sait pas. Et on est tous pareil. On n’a pas le détail. Ça semble une belle avancée mais dans les faits on ne sait pas.

Enfin, autre point très important : le statut des dirigeants non salarié, qui ne sont pas éligibles au chômage partiel. Donc depuis un an ce sont des gens qui ont de véritables difficultés financières. Au départ il y avait 1 500 € d’aides mais ce n’était pas suffisant pour payer tout ce qu’il y avait à payer. Et quand il y aura des dépôts de bilan, parce qu’il y en aura, ils n’auront aucune aide. Nous attendons des mesures positives en faveur de cette population.

 

Qu’est-ce qui, selon vous, peut être salué, à ce jour, dans les actions du gouvernement ?

Globalement, par rapport à de nombreux pays voisins, nous avons été très bien aidés, que ce soit au niveau des salariés et des entreprises. On ne peut pas reprocher grand-chose au gouvernement, en tout cas en ce qui concerne sa gestion vis-à-vis des entreprises. Le chômage partiel a été très vite mis en place par exemple. Le Ministère de Bruno Le Maire a été et l’est toujours, très à l’écoute. Ils ont été dans des réponses très pragmatiques, réalistes, aidantes. Et ça, ça doit être salué. Il n’empêche que la centralisation à Paris complexifie les choses. C’est sur la forme que c’est compliqué : les délais pour obtenir certaines aides, les informations pour le mois prochain qui arrivent en dernière minute… Et globalement, les banques ont aussi joué le jeu même s’il y a des cas où ça été compliqué d’obtenir des PGE et qu'on sent une tendance à nous blacklister. Elles ont également baissé le taux d’emprunt dans le cadre des PGE, c’est positif. Ceux qui n’ont pas joué le jeu et qui sont d’un cynisme absolu ce sont les assurances. Ils jouent l’aspect juridique en poussant les professionnels à aller au tribunal. Certaines agglomérations n’ont pas non plus joué le jeu en refusant, par exemple, de faire voter les exonérations de la CFE.

AFAFrédéricBrouillard# #GwenaëlLeHouerou# 


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Publié par Romy CARRERE



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