L'Hôtellerie Restauration No 3846

Que représente pour vous cette deuxième étoile Michelin? Jonathan Wahid : C’est une consécration. Les étoiles, ça se mérite, et nous sommes fiers d’avoir construit cette maison de nos mains, sans investisseur. Nous sommes libres, mais cela a un coût. On est passés de l’ombre à la lumière en 2017 avec la première étoile, ce qui nous a permis de franchir un cap et de pouvoir continuer à rénover les lieux. Aujourd’hui, on sent que la maison a mûri, et cette nouvelle distinction arrive au bon moment. C’est une maison familiale qui a de l’ambition. Fanny Rey : On travaille main dans la main avec une équipe formidable. Cette réussite, c’est celle de toute une maison, de la cuisine à la salle. Comment définiriez-vous votre cuisine? F. R. : Elle est essentiellement végétale, très peu grasse. Je m’inspire beaucoup de la nature, des cueillettes sauvages, des algues, de l’iode. Nous avons créé le dôme d’assaisonnement, travaillé à partir de torréfaction, de compression, de déshydrations, qu’on a fait avec les oligo-éléments qu’on récupère sur nos algues. La nature est notre première source d’inspiration, notre terroir nous aide à faire grandir nos créations. Tout est question d’association, de fraîcheur. Les légumes me passionnent, je suis toujours dans l’attente de la prochaine saison. Quels produits ou terroirs vous inspirent ? F. R. : Le végétal reste mon socle. Un souvenir fort : la tomate farcie de ma mère, qu’elle me préparait quand je revenais le week-end pendant mon apprentissage. J’en ai fait une version végétale, avec la green zebra, acidulée à souhait. Je cherche toujours à retranscrire une émotion, à créer un assaisonnement puissant et surprenant à partir de produits simples. Comment travaillez-vous ensemble au quotidien? J. W. : On s’est rencontrés au Ritz. Au départ, c’était juste pour boire un verre. C’est ici qu’on a réellement travaillé côte à côte. On est très complémentaires, on se comprend vite. Chacun a ses missions : moi plus sur l’administratif, Fanny sur la cuisine. Et le dimanche, c’est cueillette en duo. Nous sommes cimentés par notre vie de famille, nos enfants. F. R. : Cette répartition naturelle nous permet d’avancer sereinement. À chacun son rôle et ses responsabilités. Quelles évolutions vous ont permis d’atteindre ce niveau? F. R. : J’expérimente tous les jours, même si tout n’aboutit pas. Je me suis rapprochée de mon territoire, de ses producteurs. L’humain est au cœur de ma réflexion. Ce que je crée naît souvent d’un échange. Je suis aussi très curieuse. Je suis fascinée par la nature, la peinture, la liberté d’imagination... Il y a des créations qui ont mis des années à voir le jour, d’autres qui sont venues plus rapidement. Quelle expérience cherchez-vous à offrir à vos clients ? F. R. : Nous voulons être une maison chaleureuse. Nous n’avons que dix chambres, cela nous permet d’être proches de nos clients. La cuisine est ouverte, je les accueille au pass avec la première création. C’est notre façon de dire “bienvenue à la maison”. Comment votre engagement pour la durabilité se traduit-il ? F. R. : Travailler en circuit court, soutenir l’artisanat local, éviter le gaspillage… C’est une évidence SAINT-RÉMY-DEPROVENCE Depuis quatorze ans, le couple écrit l’histoire de l’Auberge de Saint-Rémy. Une maison façonnée de leurs mains pendant dix ans. Ensemble, ils mènent leur équipe de quinze personnes sans relâche, avec l’ambition de faire grandir cette maison, encore et toujours. ROMY CARRERE L’Hôtellerie Restauration • Juin 2025 MICHELIN 2025 46 © Anthony Luong La salle du restaurant L’Auberge de SaintRémy – Fanny Rey & Jonathan Wahid. © Virginie Ovessian Fanny Rey et Jonathan Wahid. Fanny Rey et Jonathan Wahid Le pari doublement étoilé

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