L'Hôtellerie Restauration No 3811

N° 3789 • 6 JANVIER 2023 N° 3811 • 10 NOVEMBRE 2023 “Je suis toujours à l’affût de l’accord unique, singulier, évident” Anne-Sophie Pic PAGES 62-69 TENDANCES & INNOVATIONS PAGES36-61 De l’info, des métiers, des passions

10 novembre 2023 - N° 3811 L’Hôtellerie Restauration 3 10 novembre 2023 - N° 3811 Gault&Millau 2024 : Yoann Conte nommé cuisinier de l’année 4-17 LES TEMPS FORTS DE LA QUINZAINE 18-22 RESTAURATION 26-29 HÔTELLERIE 32-33 JURIDIQUE 34-35 QUESTIONS- RÉPONSES 36-61 TENDANCES & INNOVATIONS 62-69 SECRETS DE CHEF 70 FONDS DE COMMERCE 71-82 ANNONCES EMPLOI 36-43 28-29 Retrouvez l’intégralité des éditos de la rédaction lhotellerie-restauration.fr/hashtag/édito Abonnements 01 45 48 45 00 abo@lhotellerie-restauration.fr Service Emploi & Annonces 01 45 48 64 64 pa@lhotellerie-restauration.fr Rédaction 01 45 48 48 94 redaction@lhotellerie-restauration.fr Publicité 01 45 48 55 85 pub@lhotellerie-restauration.fr 5 rue Antoine Bourdelle - 75737 Paris Cedex 15 web + mobile : lhotellerie-restauration.fr De l ’info, des métiers, des passions Imprimeur : Roularta Printing - Meiboomlaan 33, B-8800 Roeselare Origine du papier : Allemagne Taux de fibres recyclées : 2% Certification : PEFC - Eutrophisation : Ptot 0,005 kg/tonne PHOTO DE UNE : © EMMANUELLE THION Le Grand Mazarin, un hôtel au décor “fantasque, irréel” Le brunch est-il toujours tendance ? © GETTYIMAGES © VINCENT LEROUX © DR Ce numéro est composé de 84 pages Éditeur : SAS SEPT - Dépôt légal à parution ISSN : 2117-8917 Commission paritaire n° 0925T79916 Directeur de la publication : O. Milinaire Prix au n° : 0,77 €/temporairement 1,54 € (hebdomadaire/temporairement quinzomadaire) 4 Suivez-nous Application mobile

Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR200058 Ingrid Boinet LES TEMPS FORTS DE LAQUINZAINE Gault&Millau 2024 : Yoann Conte nommé cuisinier de l’année PARIS Le chef savoyard a été sacré lors de la cérémonie des trophées Gault&Millau. Découvrez les noms des autres talents de cette édition. Lundi 6 novembre, à l’occasion de son gala annuel, le guide Gault&Millau a récompensé plusieurs talents dans les catégories cuisinier, sommelier, directeur de salle et pâtissier, mais a également décerné six titres Grand de demain. Voici le palmarès complet du Gault&Millau 2024. Le palmarès Pour la première fois, le guide jaune avait nommé quatre talents par catégorie. Voici la liste des lauréats 2024 : • Cuisinier de l’année 2024 : Yoann Conte, restaurant La Table de Yoann Conte à Veyrier-du-Lac “Ça a été une soirée très stressante car le secret était bien gardé. Il y avait trois monstres en face de moi : deux copains bretons [Jérôme Banctel et Olivier Bellin] et un copain lyonnais [Olivier Couvin], qui font une cuisine remarquable. Ce trophée, c’est surtout pour mon équipe de l’année qui travaille d’arrache-pied avec beaucoup de passion et d’amour envers le client. Entendre son nom, ça me rappelle tout ce travail accompli depuis l’âge de 13 ans. Je n’étais qu’un petit garçon, ça n’a pas été facile… Aujourd’hui ça paie !”, s’est-il réjoui avec émotion. • Pâtissier de l’année : Naraé Kim du restaurant Pur’ - JeanFrançois Rouquette au Park Hyatt Paris-Vendôme à Paris. • Sommelier de l’année : JeanBaptiste Klein, de La Table d’Olivier Nasti, à Kaysersberg. • Directeur de salle de l’année : Thierry Pruvot, directeur de salle depuis 42 ans au Pré Catelan à Paris. “C’est très important et vraiment, ça me touche. Ça couronne ma jeune carrière !”, a-t-il dit en riant. 6 Grands de demain - Ludovic Turac, du restaurant Une Table, au Sud, à Marseille. - Félix Robert, du restaurant Arborescence, à Croix. - Antoine Gras, du restaurant La Table de l’Ours, à Val-d’Isère. - Clio Modaffari et Anne Legrand, du restaurant Le Flibuste, à Villeneuve-Loubet. - Tristan Weinling, du restaurant Utopie, à Gueberschwihr. - Mathieu Pérou, du restaurant Le Manoir de la Régate, à Nantes. 4 L’Hôtellerie Restauration N° 3811 - 10 novembre 2023 Yoann Conte reçoit le titre de cuisiner de l’année 2024, décerné par le Gault&Millau. © DR © DR Christian Le Squer à la Maison Fournaise Situé en bord de Seine à Chatou (Yvelines), ce restaurant atypique et chargé d’histoire a été fréquenté, à la fin du XIXe siècle, par Maupassant, Pissaro et surtout Renoir, qui représenta la Maison Fournaise dans son tableau Le Déjeuner des canotiers. Christian Le Squer a accepté de travailler la carte avec la cheffe Hakima El Berrimi. Depuis octobre, ils réinterprètent les plats d’époque tels les fines langoustines, les éperlans frits ou la volaille en crapaudine, en privilégiant les produits en circuit court et le terroir francilien. La Maison Fournaise propose au déjeuner des menus allant de 29 à 36 €. À la carte pour le soir. © DR

LES TEMPS FORTS DE LAQUINZAINE Mise en œuvre de l’action sociale pour soutenir les salariés des CHR touchés par les tempêtes Les salariés de la branche des CHR touchés par les conséquences des tempêtes bénéficieront d’une aide financière grâce à l’activation des dispositifs de solidarité des régimes de santé et prévoyance assurés par Klésia et Malakoff Humanis. Si, compte tenu des dégâts occasionnés par les tempêtes Ciaran et Domingos, des salariés sont contraints d’être placés en chômage partiel ou obligés de se reloger, ils pourront percevoir une aide solidaire de 1 000 € par salarié + 500 € par enfant à charge afin de faire face aux premières urgences. Cette action sociale est mise en œuvre à la demande des organisations syndicales de la branche (CGT, CFDT, FO et CFE-CGC) et de l’organisation patronale GHR en complément des garanties des régimes Prévoyance et Frais de santé HCR assurés par Klesia et Malakoff Humanis. Pour en bénéficier, il est nécessaire : - d’être salarié(e) de la branche CHR et de cotiser auprès de l’un des seuls organismes assureurs suivants : Malakoff Humanis ou Klesia ; - résider et/ou travailler dans un territoire en reconnaissance préalable de l’état de catastrophe naturelle (publication des arrêtés officiels). Le bénéfice de l’aide n’est pas conditionné à un plafond de ressources, mais dépend de l’un ou l’autre de ces cas de figure : - l’habitation a été atteinte au point d’obliger le ou les occupants à se reloger ; - l’entreprise employeuse sera fermée au moins 10 jours suite aux dégâts causés par l’événement, qui oblige l’employeur à déclencher le chômage partiel. 6 L’Hôtellerie Restauration N° 3811 - 10 novembre 2023 Pour retrouver toutes ces informations www.hcrbienetre.fr/Salarie/ vous-etes-victime-dune- catastrophe-naturelle Action sociale HCR au : 09 88 20 88 01 (numéro Cristal - prix d’un appel non surtaxé) > Alice Mafaity devient directrice générale de l’Hôtel du Louvre L’Hôtel du Louvre, à Paris, annonce la nomination d’Alice Mafaity au poste de directrice générale. Elle a exercé précédemment au sein du groupe Jumeirah à Dubaï et à Shanghai, du Hilton de Tokyo ou encore de l’Intercontinental de Hong Kong. Alice Mafaity dirige également cette année le Chapitre France Women@Hyatt, une initiative qui relie les collaboratrices et collaborateurs du groupe Hyatt dans le monde entier, afin de favoriser une culture de travail inclusive et diversifiée pour tous et soutenir, en particulier, les besoins et l’avancement des femmes au sein de l’entreprise. Alice Mafaity est diplômée de l’Essec et de la Sorbonne. > Mathieu Astuguevieille prendra la direction de l’hôtel Eklo porte de Versailles Mathieu Astuguevieille prendra la tête du plus grand établissement du groupe Eklo, dont l’ouverture est prévue en février prochain porte de Versailles, à Paris. L’établissement comptera 304 chambres, un rooftop au 9e étage avec vue sur la tour Eiffel et la capitale, un bar festif, un restaurant guinguette et des salles de réunion. Mathieu Astuguevieille a débuté sa carrière en tant que F&B Manager pendant trois ans à Londres, puis pendant deux ans au Baya Hotel & Spa Capbreton et pendant quatre ans au Dream Castle, à proximité de Disneyland Paris. Il devient ensuite directeur de la restauration du Hilton Paris Charles-de-Gaulle Airport, où il évolue au poste de responsable d’exploitation pour coordonner l’ensemble des opérations du site. En 2022, il est nommé directeur général du Courtyard by Marriott Paris Charles-de-Gaulle Airport, où il a pour mission de rouvrir l’établissement après rénovation, de développer la stratégie commerciale et opérationnelle afin d’amener l’hôtel à son rythme de croisière. Il rejoint en septembre 2023 le groupe Eklo. Mathieu Astuguevieille est diplômé de l’Institut Vatel Bordeaux, où il a obtenu un Bachelor in Hotel & Tourism Management. > Filipe Da Assunçao, nommé chef exécutif de l’Hôtel du collectionneur Filipe Da Assunçao devient chef exécutif de l’Hôtel du collectionneur, 5 étoiles à Paris. Ces cinq dernières années, il a été chef exécutif des cuisines du Royal Monceau. Il avait auparavant officié à l’Atelier Robuchon, Lapérouse et La Closerie des Lilas. Nominations © GETTYIMAGES © DR © DR © DR

Romuald Fassenet : “On veut faire gagner l’équipe de France” “Nous voulons fédérer encore plus les cuisiniers français, les supporters et faire rêver les jeunes”, affirme Romuald Fassenet, chef-propriétaire du Château du Mont Joli à Sampans, dans le Jura. Investi dans l’aventure du Bocuse d’or depuis 2008, le chef étoilé et MOF a succédé à la présidence de la Team France au chef Serge Vieira, tragiquement disparu en juillet dernier. L’ancien vice-président, à l’instar de tous les membres du nouveau bureau de la Team France, se sent investi d’une mission : celle de réaliser le rêve de Serge Vieira, faire rayonner la cuisine française. C’est devenu aussi la mission de Paul Marcon, qui a remporté en septembre à Paris la sélection France du concours. “Pour avoir goûté son plat, je peux dire que j’ai rarement trouvé une telle persistance en bouche lors d’un concours”, se réjouit Romuald Fassenet. Avec son commis, Camille Pigot, et le coach Christophe Quantin, le jeune cuisinier devra défendre les couleurs de la France au Bocuse d’or Europe qui aura lieu les 19 et 20 mars 2024 à Trondheim, en Norvège. Paul Marcon doit se placer parmi les meilleurs afin de se qualifier pour le Bocuse d’or monde qui se tiendra en janvier 2025 à Lyon, dans le cadre du Sirha. “Être professionnel et se donner les moyens” La Team France met tout en place pour le soutenir : coaching, gestion logistique, achats de produits et matériel pour les entraînements, design et fabrication des plats et de moules sur mesure, transmission de savoirfaire, mise en place d’une campagne de communication… et un soutien financier indispensable grâce aux partenaires et aux dîners organisés pour collecter des fonds. “Nous devons trouver suffisamment de financements pour gratifier le candidat pendant sa période d’entraînement, prendre en charge son logement… c’est-à-dire huit mois. Pour être bon, il faut être professionnel et se donner les moyens”, explique Romuald Fassenet. La Team France met également à disposition un lieu d’entraînement, le “refuge” à Lyon, loué à l’Institut Lyfe, prémices d’un Clairefontaine de la gastronomie promis par le président de la République, Emmanuel Macron, où se concentrent tous les aspects fonctionnels et administratifs mis au service du candidat. “Nous gérons la Team France comme une entreprise au service du candidat, du concours Bocuse d’or, de la cuisine française et de la France. Pour Serge Vieira, nous sommes tous déterminés à gagner. Nous devons faire connaître l’équipe de France et fédérer autour d'elle. On doit faire rêver les jeunes, leur donner envie de porter eux aussi le maillot de la France.” La Team France Bocuse d’or est en ordre de bataille derrière son candidat Paul Marcon, son commis Camille Pigot et leur coach Christophe Quantin, et prépare activement le Bocuse d’or Europe, prévu en mars prochain. Nadine Lemoine LES TEMPS FORTS DE LAQUINZAINE 8 L’Hôtellerie Restauration N° 3811 - 10 novembre 2023 Yohann Chapuis, Romuald Fassenet, Camille Pigot, Paul Marcon, Christophe Quantin et Davy Tissot. ©TEAM FRANCE Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR200032

LES TEMPS FORTS DE LAQUINZAINE 10 L’Hôtellerie Restauration N° 3811 - 10 novembre 2023 Accor revoit à la hausse ses perspectives pour 2023 Sommellerie : Frédéric Schaetzel est le 20e Master of Port Avec un RevPAR en hausse de 15 % par rapport à 2022, le groupe Accor confirme que la demande hôtelière est restée très soutenue au troisième trimestre 2023. Les prix moyens sont toujours élevés et le taux d’occupation est en amélioration, même s’il est légèrement inférieur au niveau de 2019. Accor a enregistré au troisième trimestre un chiffre d’affaires de 1 286 M€, en hausse de 13 % à périmètre et change constants par rapport au troisième trimestre 2022 (+ 13 % pour la division premium, milieu de gamme et économique, et + 17 % pour la division luxe & lifestyle). Le groupe réhausse par conséquent ses perspectives pour 2023, avec un excédent brut d’exploitation compris entre 955 et 985 M€. La croissance du RevPAR est désormais estimée à un peu plus de 20 % (auparavant dans le haut de la fourchette entre 15 % et 20 %). Toutefois, “les premiers signes de normalisation de la croissance de l’activité apparaissent après plusieurs trimestres de reprise intense”, indique le géant européen de l’hôtellerie. B&B Hotels crée une classe de BTS tourisme à Paris Le groupe B&B Hotels s’est associé à l’école de management du tourisme ESG pour créer une classe de BTS tourisme en alternance, dédiée aux jeunes issus des quartiers défavorisés d’Île-de-France. Vingtsix alternants sont accueillis cette année sur le campus situé dans le XIe arrondissement de la capitale. Depuis septembre dernier, ces jeunes suivent, en plus de leur cursus classique, des ateliers pédagogiques co-construits avec B&B Hotels, pour apprendre à accueillir, informer, conseiller la clientèle française et étrangère sur une gamme variée de prestations de voyages, créer et promouvoir des produits touristiques… Ils sont accueillis en alternance au sein des B&B Hotels de Paris Chatillon, Argenteuil, Gennevilliers, Cergy…“Cette initiative s’inscrit dans le cadre de l’engagement de B&B Hotels en faveur de la diversité et de l’accès à l’emploi, tout en répondant aux besoins de recrutement de ses hôteliers partenaires”, indique la chaîne d’hôtellerie économique. Si la France est le premier pays consommateur de vins de Porto, c’est aussi dans l’Hexagone qu’est né, en 1988, le Master of Port, un concours de sommellerie spécialisé sur les vins de Porto. Le 5 novembre, à Paris, ils n’étaient plus que huit candidats à disputer la demi-finale et, le lendemain, seuls les trois meilleurs sont restés sur la scène pour les ultimes épreuves. Les six premières étapes, avec notamment des approches originales de l’accord mets-vins ou bien du commentaire de dégustation étaient vécues à tour de rôle par les finalistes. Le dernier temps fort, l’ouverture d’une bouteille de porto à la pince, associait maîtrise technique et dimension spectaculaire. Frédéric Schaetzel, sommelier au sein de l'Auberge de l'Ill, le restaurant de la famille Haeberlin à Illhaeusern, a remporté le titre face à Seika Hosokawa (sommelière conseil à Paris) et Pierre-Alexis Mengual (chef sommelier du Château L’Hospitalet à Narbonne). Le MGallery Domaine de la Reine Margot, à Issyles-Moulineaux, a ouvert le 24 octobre dernier. Les alternants seront accueillis dans l'un des hôtels B&B partenaires d'Île-de-France. Seika Hosokawa, Frédéric Schaetzel et Pierre-Alexis Mengual. © ROMAIN RENARD

Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR75544 LES TEMPS FORTS DE LAQUINZAINE Patrick Hayat (Atop) : “Nous menons un combat citoyen pour que nos villes ne soient pas défigurées” L’hôtelier a pris la tête de l’Association pour un tourisme professionnel (Atop) en mai dernier. Il souhaite poursuivre la lutte pour obtenir l’égalité fiscale et réglementaire, l’harmonisation des normes d’hébergement et lutter contre la professionnalisation de la location des meublés, bien loin de l’économie de partage défendue par ses partisans. L’Hôtellerie Restauration : Vous avez été élu à la tête de l’Atop en mai dernier. Quels seront les chantiers principaux de votre mandat ? Patrick Hayat : Mon projet est double : tout d’abord, continuer sur la voie déjà tracée par mes prédécesseurs, c’est-à-dire établir une concurrence loyale entre tous les acteurs d’hébergement, et être force de proposition pour que la France puisse accueillir tous les visiteurs de la meilleure manière et avec des règles du jeu identiques pour tous, aux niveaux fiscal, législatif et des normes. D’autre part, l’Atop a aussi vocation à être force de proposition pour mieux comprendre les enjeux du tourisme de demain. Nous nous penchons principalement sur le sujet de l’intelligence artificielle, qui est une révolution majeure notamment dans l’hôtellerie. Il faut comprendre comment l’utiliser au mieux pour améliorer les services ainsi que le fonctionnement de nos établissements. Où en êtes-vous de votre combat contre les abus des locations saisonnières ? Nous voyons fleurir des locations d’appartement sans changement de droit d’usage ni de droit de destination. Mais notre travail contre ces abus n’est pas qu’un combat professionnel, c’est un combat citoyen pour que nos villes ne soient pas défigurées. Au quotidien, nous entendons beaucoup de maires, épuisés et désemparés, qui n’ont aucun contrôle ni aucune visibilité sur ce qui se passe dans leur ville et constatent qu’il n’y a plus de possibilité de s’y loger. Qu’allez-vous proposer ? Nous souhaitons que le numéro d’enregistrement soit unique et national, et non municipal comme aujourd’hui. Cela permettrait aux maires de comprendre ce qui se passe dans leur ville. De plus, nous voulons que le droit d’enregistrement, avec ce numéro national, ne soit pas corrélé au changement d’usage du logement. Cela permettrait de récupérer les données de toutes les plateformes et de les transmettre aux municipalités. Un projet de loi, baptisé SREN [Sécuriser et réguler l’espace numérique], est en cours d’examen. Nous voulons aussi que le loueur fournisse son avis d’imposition lors de sa demande de numéro d’enregistrement, pour que l’administration puisse vérifier s’il s’agit bien de sa résidence principale. Nous souhaitons la fin de la niche fiscale pour les loueurs professionnels, afin de sortir de cette concurrence déloyale et mettre fin à l’inégalité concurrentielle. Nous demandons également que mes meublés soient soumis à la TVA, ce qui permettrait que 10 % des recettes enregistrées par les plateformes rentrent dans les caisses de l’Etat. Ce manque à gagner atteint un milliard d’euros chaque année. 12 L’Hôtellerie Restauration N° 3811 - 10 novembre 2023 Patrick Hayat : “L’Atop a vocation à être force de proposition pour mieux comprendre les enjeux du tourisme de demain.” © DR Suivez-nous sur nos réseaux Roselyne Douillet

Formation : pourquoi sensibiliser les jeunes à la polyvalence ? Le constat est sans appel : près d’un restaurateur sur 4 (21 %), tous secteurs confondus, peine à embaucher et à retenir ses salariés, selon une étude menée par Checkmarket pour la plateforme Lightspeed et publiée en janvier 2023. Conséquence : automatisation des tâches, développement du click & collect ou souscription à un nouveau logiciel de caisse sont quelques-unes des initiatives adoptées par les restaurateurs interroNANTES Dans le cadre du dernier salon Serbotel, formation et emploi étaient au cœur des débats. L’occasion pour Olivier Dardé, à la tête de l’Umih 44, de souligner l’importance d’avoir des jeunes “polycompétents” qui arrivent sur le marché du travail. Explications. Anne Eveillard Le patron de l’Umih 44 reconnaît que les jeunes actifs qui arrivent sur le marché du travail n’ont pas le même profil que leurs prédécesseurs. “Le CDI ne les fait plus rêver. Ils zappent, passent d’un établissement à un autre, entrecoupent volontiers un parcours d’un break à l’étranger. Par ailleurs, famille et loisirs passent avant le travail. Dès que l’effort demandé empiète sur la vie personnelle, bon nombre n’hésitent pas à quitter l’entreprise”, détaille Olivier Dardé. Un turnover qui pénalise hôteliers et restaurateurs. “Pourtant, on déroule le tapis rouge aujourd’hui pour attirer les jeunes talents : on évite les coupures, les salaires ont augmenté, les plannings de travail sont assouplis…” Mais cela ne suffit pas toujours. Résultat : Olivier Dardé observe que le recrutement des seniors augmente, “car ils ont envie de s’impliquer et ils ont des valeurs de travail”. “Le CDI ne fait plus rêver” LES TEMPS FORTS DE LAQUINZAINE Pour Olivier Darde, président de l'Umih 44, “la polycompétence et la polyvalence sont primordiales aujourd’hui sur le terrain.” © DR

gés. Des solutions qui, certes, comblent ponctuellement la carence d’effectifs. Mais sont-elles idéales à l’heure où le client recherche du service, de l’humain, de l’échange, du partage ? N’y-a-t-il pas d’autres pistes à explorer pour créer davantage d’attractivité ? En particulier auprès des jeunes ? Le débat a été ouvert durant le dernier salon Serbotel, à Nantes (Loire-Atlantique), dans le cadre d’une réflexion proposée par le Marché d'intérêt national (MIN) de Nantes sur le thème ‘Les formations sont-elles adaptées à l’évolution des nouveaux modèles du CHR ?’ Réponse d’Olivier Dardé, président de l’Umih 44 : “Actuellement, 200 000 postes sont à pourvoir dans le secteur des CHR et l’on recherche aussi 40 000 apprentis. Des jeunes arrivent sur le marché du travail. La majorité d’entre eux ont suivi une formation qualifiante, mais pas dans la polyvalence. Or, les petites entreprises, qui représentent 90 % du secteur des CHR, recherchent de la polyvalence.” Miser sur les formations courtes La polyvalence n’est pas encore une matière inscrite dans les référentiels de formation initiale. Alors comment développer cette capacité, cette sensibilité, chez les jeunes ? Thierry Marx, le patron de l’Umih, prône les formations courtes. À l’instar de celles qu’il a initiées avec son concept Cuisine, mode d’emploi(s), qui propose des formations de 11 semaines en cuisine, boulangerie, service en restauration… avec à la clé un diplôme reconnu par l’État et la branche professionnelle. Olivier Dardé approuve : “Nous n’avons pas toujours le temps de former sur le tas. Or, la polycompétence et la polyvalence sont primordiales aujourd’hui sur le terrain.” Il explique en effet que, dans une même journée, “le salarié d’un petit hôtel indépendant peut passer de la réception au petit déjeuner, de la comptabilité à une recouche”. Faut-il pour autant refondre la totalité des programmes scolaires ? Le patron de l’Umih 44 tempère : “Non, car ils apportent les bases de nos métiers. Toutefois, le télétravail, le soin apporté à l’atmosphère et la décoration d’un lieu, le succès du snacking comme celui des locations saisonnières doivent faire bouger les lignes. Tout évolue très vite, l’Éducation nationale doit s’adapter à ces transformations, tout comme les jeunes vont devoir apprendre à s’ajuster en permanence.” Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR200002 Nina Métayer nommée meilleure pâtissière du monde Le 25 octobre à Munich, se tenait le dîner de gala annuel de l’Industrie de la boulangerie et de la pâtisserie, au cours duquel l’Union internationale des boulangers et pâtissiers (UIBC) a décerné les titres de meilleurs pâtissier mondial et boulanger mondial 2023. La Française Nina Métayer a été élue World Confectioner 2023, soit meilleure pâtissière mondiale 2023. Elle est ainsi première femme à être récompensée par ce prix pour son travail, ainsi que celui de ses équipes au quotidien : “Je remercie mes pairs pour leur confiance et cette distinction me touche d’autant plus que mon parcours a débuté en boulangerie. Je suis ravie de représenter la France et de contribuer à faire rayonner la qualité du travail des artisans boulangers et pâtissiers dans le monde avec l’UIBC”, a-t-elle déclaré. Wu Tzu Ching, chef Taïwanais, a, quant à lui, remporté le prix du meilleur boulanger mondial 2023.

GHR : le congrès de la transition sereine “Ce congrès est important pour moi, car il s’agit du dernier que je tiendrai en tant que président, fonction que j’ai occupé pendant quinze ans, à la tête des trois organisations qui se sont succédé : le Synhorcat, le GNI et le GHR”, déclare Didier Chenet, président du GHR. Le Groupement des hôtelleries et restaurations de France est né en janvier 2023 de la fusion de trois organisations professionnelles, le GNI, le SNRTC et le SNRPO, avec à sa tête Didier Chenet et Hervé Dijols, en tant que vice-président. Tous deux avaient annoncé leur volonté d’assurer cette fonction pour un an avant de transmettre le flambeau. Catherine Quérard est la seule candidate en lice pour la présidence (lire cicontre). L’énergie, dossier épineux Les tarifs de l’énergie représentent un coup de massue pour les entreprises. Il y a bien la mise en place du bouclier tarifaire, mais ses effets sont limités et surtout, il ne concerne pas toutes les entreprises. “D’une moyenne de 3 % du coût de l’énergie, on arrive à 7 % du chiffre d’affaires. Cette augmentation de 4 points représente la marge que dégagent nos entreprises”, précise Didier Chnet qui demande “l’extension du bouclier tarifaire aux PME et sans condition de puissance du compteur.” Le dispositif est actuellement réservé aux très petites entreprises ayant moins de 10 salariés, une mesure reprise par une proposition de loi qui doit être examinée par le Sénat. Le volet social • Le projet de loi de finances pour 2024 ne prévoyait pas la reconduction de l’exonération de charges sociales et d’impôt sur le revenu pour les pourboires remis librement aux salariés. Le GHR a aussitôt alerté les députés. Émilie Bonnivard, députée (LR) de la Savoie, a déposé un amendement que le Gouvernement a accepté de reprendre afin de prolonger cette exonération pour deux ans. • L’organisation professionnelle demande que la profession soit reconnue comme métier en tension afin de permettre la régularisation des travailleurs étrangers avec alias (qui travaillent avec les papiers d’un autre salarié). Elle souhaite que la circulaire Valls soit intégrée dans le projet de loi immigration pour que les règles soient les mêmes pour tous. • Le GHR souhaite que soit revu le dispositif sur le bonusmalus qui augmente le taux de la cotisation chômage pour les entreprises qui utilisent beaucoup le CDD. Ce dispositif pénalise particulièrement les entreprises saisonnières ets les traiteurs organisateurs de réception dont l’activité nécessite le recours au CDD saisonnier ou au contrat d’extra. Le bonus-malus ne prend pas en compte ces spécificités. Commissions des titres-restaurant • Suite à l’avis rendu par l’Autorité de la concurrence sur les commissions des titres-restaurant, Didier Chenet considère que son organisation doit travailler de concert avec les services de la ministre Olivia Grégoire. Parmi les pistes évoquées par l’Autorité, celle d’un meilleur rééquilibrage des commissions entre les entreprises et les restaurateurs, et pouvoir remettre tous les titres à un seul émetteur pour faire baisser le taux des commissions. • Autre cheval de bataille du GHR : l’équité fiscale entre tous les acteurs de l’hébergement touristique marchand. Le projet de loi de finances pour 2024 prévoit de revoir la fiscalité des meublés de tourisme. Le Gouvernement a décidé de réduire l’abattement de 71 % à 50 % sur les revenus des meublés avec un seuil à 77 700 €. Le GHR réclame aussi l’obligation d’enregistrement de tous les meublés dès la première nuitée pour tout le monde. • Enfin, sur le fait maison, le GHR, se déclare satisfait des déclarations d’Olivia Grégoire. “Cela va dans le sens d’une clarification et du dépoussiérage de cette appellation qui doit prendre en compte la réalité du travail des professionnels”, souligne Didier Chenet. PARIS Le Groupement des hôtelleries et restaurations de France tiendra son congrès annuel les 13 et 14 novembre. Ce sera le dernier pour Didier Chenet, président du syndicat, qui passera les rênes à Catherine Quérard. Pascale Carbillet LES TEMPS FORTS DE LAQUINZAINE 16 L’Hôtellerie Restauration N° 3811 - 10 novembre 2023 Didier Chenet : “Ce congrès est le dernier que je tiendrai en tant que président.” © DR Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR200038

À bientôt 57 ans, Catherine Querard, vice-présidente du GHR, se présente, sans autre adversaire, à la présidence du syndicat. Pour l’accompagner au titre de vice-présidents : Fabienne Ardouin, directrice générale de deux hôtels parisiens, et Robert Guillet, directeur général du groupe Buffalo. La candidate souhaite poursuivre “le travail de construction et de rassemblement, initié par Didier Chenet et Hervé Dijols” et maintenir un syndicat “agile, moderne et actif”. Elle tient à penser collectif : “Travaillons ensemble et ne soyons pas dans l’opposition. Si on veut faire avancer les sujets, avec les gouvernants, il faut qu’on soit rassemblés.” Côté institutionnel, Catherine Querard tient à conserver le travail déjà initié. “On voit bien la nécessité absolue de travailler en collaboration ou en alerte avec les équipes d’Olivia Grégoire [ministre déléguée chargée des PME, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme]. Il y a un autre travail à faire avec Olivier Dussopt, ministre de l’Emploi. Si on n’a pas les femmes et les hommes pour travailler chez nous, si on n’est pas attractif, on va fermer. On a énormément travaillé sur la qualité de vie au travail et on a l’impression que rien ne se passe. Il y a une pédagogie globale à remettre en place, ça ne viendra pas que de nous. La cohésion sociale, dont nous sommes acteurs, est fondamentale.” Le mot de Catherine Querard, candidate à la présidence du GHR © DR

Le Ritz confie son restaurant gastronomique à Eugénie Béziat Eugénie Béziat a un parcours atypique. Après des études universitaires de langues étrangères appliquées, elle s’est convertie à la cuisine en passant un BTS en alternance au lycée des métiers hôtellerie et tourisme de Toulouse. Elle a fait ses classes auprès de Michel Guérard à Eugénie-les-Bains, et Michel Sarran à Toulouse, auprès de qui elle restera huit ans. Pour sa première place de cheffe, à La Flibuste de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes), on lui donne carte blanche. Elle laisse libre cours à son inspiration. Un an et demi plus tard, l’étoile Michelin vient récompenser sa cuisine. Elle est repérée, et le Ritz, en quête d’un talent à la fois confirmé et prometteur, la sollicite. À nouveau, Eugénie Béziat a les coudées franches. “Je n’ai pas pensé une seconde à refuser, surtout que j’ai aussi eu la chance de participer à la conception du restaurant, depuis la création de la cuisine au choix de la vaisselle [Astier de Villatte, NDLR] en passant par les choix forts en matière de décoration, dit la cheffe, qui a fêté ses 40 ans en juillet. Le restaurant vient d’ouvrir, mais je suis arrivée il y a dix-huit mois. On a beaucoup travaillé avec François Perret pour la pâtisserie et Florian Guilloteau, directeur de la sommellerie de Ritz Paris, sur les accords mets-boissons. L’ouverture était attendue. Nous l’attendions aussi.” Le restaurant L’Espadon - devenu Espadon - a changé de place. Il a retrouvé son emplacement initial, décidé par Charles Ritz dans les années 1950, profitant ainsi d’une terrasse de 200 m² avec vue sur les jardins de l’hôtel. La scénographie impressionne dès le vestibule avec ses bas-reliefs en forme de feuille de rhubarbe, qui ouvre sur une salle aux tons doux et lumineux avec ses moulures cuivrées. Aussi cuivrée et vitrée, la vue sur la brigade en action en cuisine. PARIS Étoilée en 2020 à La Flibuste de Villeneuve-Loubet, la cheffe a été contactée pour reprendre le restaurant Espadon du palace parisien. Comment résister ? RESTAURATION 18 L’Hôtellerie Restauration N° 3811 - 10 novembre 2023 Le restaurant Espadon avec vue sur la cuisine vitrée où officie la brigade. © VINCENT LEROUX Nadine Lemoine Eugénie Beziat revendique une cuisine gastronomique française empreinte d’une nostalgie liée à sa jeunesse passée en Afrique. © STUDIO PAM Volaille, oignon, agrumes. © EMANUELA CINO

“Mariage de l’iode et de la braise” Eugénie Béziat a passé ses dix-huit premières années en Afrique, ce qui n’est pas anodin concernant la formation de son palais. “Ma signature est une cuisine française en quête perpétuelle d’un goût, d’une odeur… loin d’ici. Ce sont les réminiscences de la terre brûlante, d’une note fumée, du parfum d’une mangue ou le souvenir débordant d’un sirop de bissap [fleur d’hibiscus] glacé que l’on s’arrachait à la sortie de l’école… C’est le mariage de l’iode et de la braise !”, explique la cheffe du restaurant Espadon. Ainsi le Homard, manioc, bissap fait déjà figure de plat signature. La volaille de Houdan travaillée dans l’esprit du poulet yassa avec la note balsamique de l’oignon noir cuit en croûte d’argile et l’acidité du citron dévoile une autre facette de la cuisine d’auteur d’Eugénie Béziat. Une identité culinaire singulière, à suivre. Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR75717 Nombre de places assises : 25 Nombre de services : 5 (dîner du mardi au samedi) Menus : 290 € en 5 séquences, 380 € en 8 séquences Accord mets et vins en 8 séquences : 270 € par personne. 220 € pour l’accord mets et sensations (sans alcool). Effectifs : 10 personnes en cuisine, 10 en salle Restaurant Espadon Homard, manioc, bissap. © EMANUELA CINO

Brique House : quand le brasseur devient restaurateur Brique House, c’est une formule dont la synergie est le maître-mot : la production de bières originales d’un côté et la création d’une nouvelle expérience food et bières dans des lieux hybrides, entre restaurant et brasserie, le tout dans une ambiance festive. L’expérience professionnelle de Baptiste Dufossez, 32 ans, chez Anheuser-Busch Inbev, le plus grand groupe brassicole au monde, lui a servi de révélateur : il y a une demande pour la craft beer (bière artisanale) en France. Joseph Timmermans, 40 ans, passé chez PARIS Baptiste Dufossez et Joseph Timmermans ont ouvert leur premier restaurant dans la capitale, baptisé Brique Machine. Le duo est à la tête d’une production de bières artisanales qu’il met en valeur dans cinq lieux hybrides et festifs. RESTAURATION D’une superficie de 1 100 m2 sur trois niveaux, Brique Machine peut recevoir jusqu’à 350 clients. © DR Nadine Lemoine

Agapes Restauration, apporte son expérience du secteur. Le duo fonde la brasserie Brique House, à Fretin dans le Nord, et en parallèle, un modèle “entre le bar et le restaurant, proche du pub anglais” qui mettra en valeur leurs bières. Ils ont désormais cinq “taprooms” (bar où une brasserie vend ses propres bières) à leur actif : Briqueland à Saint-André-lez-Lille, Hein à Lille, Heavy Brique à Villeneuve-d’Ascq, Backyard à Bordeaux et tout dernièrement Brique Machine à Paris. Situé dans le quartier des Grands Boulevards, le nouveau lieu d’une superficie de 1 100 m2 sur trois niveaux peut recevoir jusqu’à 350 clients. Ouvert 7 jours sur 7 (jusqu’à 0 h 30, voire 2 heures du matin), le restaurant emploie 70 salariés. Bien en évidence, les cuves de brassage, signature de la maison, attirent l’œil. La gamme permanente comprend 7 bières, auxquelles s’ajoutent une création tous les 15 jours, et trois cocktails à la bière. La décoration rappelle les années 1990 avec ses murs roses et ses objets de la pop culture, ses néons et jeux d’arcade. “Nous avons travaillé pendant deux ans sur notre modèle avant de nous lancer en 2020. Les trois ouvertures dans le Nord avec trois styles de restauration différents nous ont permis de retenir le meilleur en accompagnement des bières”, explique Baptiste Dufossez. Dans le nouveau Brique Machine, les meilleures ventes sont le beef burger (double steak smash, cheddar, sauce maison, pickles), le Welsh du ch’Nord (pain de campagne, jambon, cheddar à la bière, moutarde de Dijon) et la pizza Margherita. Accords mets et bières Entre les burgers et les pizzas, une offre healthy propose avocado toast et ceviches. “Sur la carte, pour chaque plat, une bière est conseillée. Cela engendre entre 10 à 15 % d’augmentation du ticket moyen”, estime Baptiste Dufossez. Le ticket moyen oscille entre 22 et 25 € le midi et atteint 30 € le soir. Baptiste Dufossez et Joseph Timmermans envisagent un développement maîtrisé avec une trentaine de restaurants en France dans les cinq prochaines années, dont 5 à 10 % en propre. En parallèle, ils entendent poursuivre la conquête de parts de marché dans la bière. Deux tiers de leur production sont vendus dans les CHR. Ils comptent aujourd’hui 5 000 points de vente, avec une équipe de 6 commerciaux sillonnant la France. Le succès de l’un renforce l’autre. Baptiste Dufossez et Joseph Timmermans ont imaginé des lieux “entre le bar et le restaurant” pour mettre en valeur leur production de bières. Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR74976 © DR

Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR75517 22 L’Hôtellerie Restauration N° 3811 - 10 novembre 2023 RESTAURATION Présente au concours international S. Pellegrino Young Chef, qui s’est déroulé à Milan, la cheffe est revenue sur la notion de cuisine durable, qui était au cœur des préoccupations des candidats comme des membres du jury. L’Hôtellerie Restauration : Dans votre cuisine, quel est votre rapport au végétal ? Hélène Darroze : J’ai toujours aimé le végétal. Je l’ai découvert avec Alain Ducasse. Chez moi, dans les Landes, on était plus portés sur les protéines que le végétal. Mais dès 1990, chez Alain Ducasse, j’ai découvert un plat composé uniquement de légumes. J’ai été scotchée. Je me suis dit : “Mais comment peut-on mettre un plat de légumes à la carte ?” Je n’ai pas compris. Après, quand j’ai découvert le plat de légumes en question, sa complexité et son intérêt, j’ai vu que c’était juste génial ! Cela fait très longtemps que j’ai intégré le végétal dans ma cuisine. À la Villa La Coste, en Provence, où j’ai mon potager, mon jardinier, et tous ces petits producteurs autour de moi, je le renforce encore plus. Néanmoins, la protéine est toujours présente dans ma cuisine, même à la Villa La Coste où elle vient en tant que garniture. Je ne conçois pas une cuisine sans protéines. Il faut un équilibre, respecter les saisons même dans les protéines et préserver des races. On a tous une responsabilité à ce sujet. Le durable prend aussi en compte les conditions de travail. Qu’en est-il dans vos restaurants ? Je considère mes collaborateurs comme ma famille. On est dans le partage, la générosité, l’appréciation réciproque. Je veille à la transmission de valeurs. Avec la maturité, je sais ce que je veux transmettre et ce qui est important pour moi. Je pense que cela marche puisqu’aujourd’hui, j’ai une base de collaborateurs qui sont là depuis un certain temps. Ils s’engagent et veulent grandir avec moi. Comme dans une famille, j’essaye de prendre soin d’eux avec, par exemple, des salles de repos. J’ai aussi installé une machine à laver et un sèche-linge s’ils veulent s’occuper de leur linge personnel sur place. Comme ça, ils n’ont pas à le faire le weekend. Il y a des moments où je fais venir une masseuse pour les relaxer. On se retrouve aussi pour de grosses fêtes. On célèbre tous les anniversaires. Je viens d’apprendre que, dans mon dos, depuis des années, ils m’appellent maman ! Je pense que l’on forme une grande famille assez stable dans le fond et qui donne envie, car au niveau du recrutement, je ne m’en sors pas trop mal dans ces périodes très difficiles. Hélène Darroze : “Je ne conçois pas une cuisine sans protéines” Nadine Lemoine Pour son dernier long métrage documentaire, le cinéaste américain Frederick Wiseman - qui scrute son pays à travers des documentaires depuis plus de 50 ans - a choisi un sujet pour le moins éloigné de son Amérique natale : le restaurant de la famille Troisgros, à Ouches (Loire). Comme l’explique le journal Le Point, le réalisateur a ainsi suivi quotidiennement les équipes du restaurant 3 étoiles Michelin pour concevoir un documentaire de 4 heures, qui sortira dans les salles de cinéma françaises le 20 décembre. Le film est déjà bien accueilli par la critique internationale : “Fascinant”, a notamment salué le New York Times, et “Un modèle inspirant pour les chefs”, considère le Hollywood Reporter. L’Intercontinental Marseille-Hôtel Dieu ferme son restaurant étoilé Alcyone Menus-Plaisirs : un cinéaste américain plongé dans le restaurant de la famille Troisgros © DR Hélène Darroze : “Il faut un équilibre, respecter les saisons même dans les protéines et préserver des races. On a tous une responsabilité à ce sujet.” © FÉLIX LEDR Michel (arrière-plan) et César Troisgros. Inauguré en octobre 2013, le restaurant gastronomique Alcyone, situé au sein de l’hôtel Intercontinental Hôtel-Dieu à Marseille, a décroché une étoile Michelin dès 2014 grâce à la cuisine de Lionel Lévy. À la suite de l’annonce du départ du chef début 2024, l’hôtel précise qu’Alcyone fermera ses portes après le réveillon de la Saint-Sylvestre. L’hôtel annonce “qu’après une courte pause, une nouvelle page s’écrira courant 2024”.

24 L’Hôtellerie Restauration N° 3811 - 10 novembre 2023 SERVICE EN SALLE Louis Morin : “Transmettre, c'est ce que j'aime le plus” Qu'avez-vous envie d'apporter de nouveau ? Je n’arrive pas en révolutionnaire ! Je ne vais rien bouleverser dans ce qui existe déjà. Toutefois, si je le peux, j’aimerais repenser le service du fromage, car c’était mon thème lors de la finale du concours de MOF. Quel regard portez-vous sur la transmission ? Je suis fils de profs, alors transmettre, c’est ce que j’aime le plus. J’ai envie d’apprendre aux autres, expliquer que l’on peut faire ce métier intelligemment, en restant curieux et à l’écoute. Certes, il faut se donner pour progresser, aller de l’avant, mais ce métier rend beaucoup. Quel regard portez-vous sur le service du pain ? Il faut attirer l’attention sur le travail d’un homme et transmettre de la générosité, afin d’ajouter de l’émotion au service. Quel regard portez-vous sur le service du vin ? Sur ce point, au restaurant La Grand’Vigne, je vais réfléchir avec le chef de cuisine Nicolas Masse et le chef sommelier Aurélien Farrouil. Comment voyez-vous le service en salle dans un restaurant gastronomique en 2023 ? Comment moderniser le service tout en respectant le savoir recevoir à la française ? Meilleur ouvrier de France maître d’hôtel, Louis Morin a rejoint l’équipe du restaurant doublement étoilé La Grand’Vigne, aux Sources de Caudalie à BordeauxMartillac. Nommé directeur de cette table de 40 couverts, il travaille avec le chef de cuisine Nicolas Masse et le chef sommelier Aurélien Farrouil. Un trio aux commandes d’une expérience gourmande unique, en terres viticoles. Je le vois décomplexé, mais respectueux d’une disposition, d’une personnalisation, d’une expérience, d’un accueil et de mots choisis. Car la parole reste le meilleur moyen de faire passer un message, s’adapter à la personne que l’on a en face de soi et jouer un rôle de guide lorsqu’il faut, par exemple, expliquer les nuances d’une cuisson. Ne plus imposer de codes complexes au client. Éviter le service trop rigide. Mais rester dans la bienveillance, le savoir être et la générosité en pensant, par exemple, à resservir de la sauce. Par Anne Eveillard

Bio express Naissance : 29 novembre 1993. • Diplômé du lycée hôtelier Savoie Léman, à Thonon-les-Bains (Haute-Savoie). • A travaillé au Manoir aux Quat’Saisons dans l’Oxforshire (Grande-Bretagne), la Maison Decoret à Vichy (Allier), la Maison Wenger au Noirmont, en Suisse. • MOF dans la classe maître d’hôtel en 2023. © GETTYIMAGES © DR

Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR75694 Le Moulin de Monjous fait rimer hôtellerie et insertion GRADIGNAN L'établissement 3 étoiles de 7 chambres embauche des personnes en situation de handicap. Un tremplin vers le milieu professionnel ordinaire. Construit en lisière de Bordeaux, Le Moulin de Monjous a déjà eu plusieurs vies : moulin à farine, atelier de lavage des peaux de mouton, usine de fabrication d’obus pendant la Première Guerre mondiale, lieu d’hébergement de la congrégation des Salésiens de Don Bosco… jusqu’à ce qu’il soit transformé en hôtel 3 étoiles, en 2018. L’établissement, qui compte sept chambres, développe notamment les séminaires, les cocktails et le coworking, et fonctionne sous la houlette de l’Esat (établissement et service d’aide par le travail) Les Ateliers Saint Joseph, géré par l’Institut Don Bosco. Sa particularité ? Il emploie et forme des personnes en situation de handicap. “Le Moulin de Monjous est l’un des ateliers de professionnalisation de l’Esat. Il permet à nos travailleurs qui le souhaitent de découvrir les métiers hôteliers, selon leur projet personnalisé”, précise Jérôme Réguème, directeur de l’Esat. Certains travailleurs passeront ainsi quelques mois seulement au Moulin avant de retourner dans un autre atelier. D’autres pourront rester plusieurs années, valoriser leurs compétences avec une reconnaissance des acquis et de l’expérience (RAE), ou Violaine Brissart HÔTELLERIE 26 L’Hôtellerie Restauration N° 3811 - 10 novembre 2023 © DR Depuis le 1er janvier 2023, les travailleurs handicapés en Esat peuvent travailler, simultanément et à temps partiel, dans une entreprise ordinaire ou adaptée, ou exercer une activité professionnelle indépendante. Cette nouvelle mesure, mise en place par la loi dite 3DS (pour différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification) et son décret d’application, est destinée à faciliter l'entrée progressive sur le marché du travail. Elle s'ajoute aux passerelles vers l’emploi ordinaire existant depuis plusieurs années : périodes de mise en situation en milieu professionnel, mises à disposition, etc. Des passerelles entre les Esat et le milieu ordinaire trouver éventuellement un poste dans le milieu ordinaire. “Plusieurs dispositifs existent pour faciliter cette transition. Soit la personne peut quitter l’Esat, soit nous proposons des détachements : le travailleur est toujours travailleur de l’Esat et bénéficie de l’accompagnement, mais il travaille dans une structure ordinaire à temps plein ou temps partiel”, note-t-il. “Outil d’insertion” Cet hôtel inclusif s’avère, aux yeux du directeur, “un support pour appréhender le travail en milieu ordinaire” et un “formidable outil d’insertion”. “Les personnes qui ont un handicap, une fois formées, développent de vraies compétences et peuvent être très polyvalentes. Mais pour que cela puisse fonctionner dans le milieu ordinaire, il faut savoir garder la bonne distance dans son management, et ne pas être trop dans la proximité et l’empathie. L’adaptabilité est aussi très importante.” Bien que cette dynamique d’insertion soit au cœur de l’activité, l’hôtel reste discret sur sa démarche. “Le fait d’être un hôtel d’insertion vient en second : nous le précisons juste sur le site internet et à l’accueil, explique Jérôme Réguème. Nous nous présentons avant tout comme un hôtel aux prestations de qualité. Nous avons 8,7/10 sur Booking.com.” Une note qui permet de “vraiment valoriser toute l’équipe”. Le Moulin de Monjous emploie sept personnes en situation de handicap, formées sur le tas.

Le Grand Mazarin, un hôtel “au décor fantasque, irréel” PARIS Le groupe Maison Pariente a inauguré, en plein cœur du Marais, un hôtel classé 5 étoiles qui propose 61 chambres et suites, un spa avec piscine, et un restaurant signé du chef Assaf Granit. Rencontre avec Kimberley Pariente, cofondatrice et directrice artistique du groupe familial. L’Hôtellerie Restauration : Après Méribel, Crillon-LeBrave et Saint-Tropez, pourquoi avoir choisi le cœur de Paris pour votre nouvel établissement ? Kimberley Pariente : Nous avons la chance d’investir notre argent donc, comme pour toutes nos adresses, ce sont des opportunités, des coups de cœur qui se présentent à nous, sur des emplacements premium. Pour le Grand Mazarin, le projet de départ était d’acquérir un immeuble. Puis nous avons appris que celui d’à côté était à vendre, puis un autre. C’était un challenge, car c’est notre premier hôtel urbain, ouvert à l’année. Comment avez-vous conçu les lieux ? En tant que Parisiens, il a été compliqué de nous mettre dans la peau d’un touriste à Paris. Nous avons voulu créer un lieu où les gens se réinventent, leur offrir l’impression de voyager dans d’autres époques. On a dû imaginer un décor complètement fantasque, irréel, qui transporte. On a choisi un décorateur - Martin Brudnizki - qui a ce grain de folie. Avec ma sœur [Leslie, NDLR], nous sommes tombées amoureuses de son travail. On voulait sortir des codes, ramener le Paris de fête, le Paris cosmopolite. Il était également important pour nous de créer un hôtel qui allait à la fois plaire à la clientèle étrangère mais aussi aux Parisiens. Romy Carrere HÔTELLERIE 28 L’Hôtellerie Restauration N° 3811 - 10 novembre 2023 Le groupe Pariente a fait appel au décorateur Martin Brudnizki. Leslie (à gauche) et Kimberley Pariente. © VINCENT LEROUX © DR

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