L'Hôtellerie Restauration No 3801

18 L’Hôtellerie Restauration N° 3801 - 23 juin 2023 “Nous étions dans une dynamique commune”, confie El Hadji Faye, délégué syndical CGT au sein de l’hôtel Prince de Galles et membre du comité exécutif HCR pour la CGT. La direction de l’établissement parisien (VIIIe) et le syndicat ont ainsi signé, fin mai dernier, un accord qui reconnaît que pour “certaines fonctions identifiées”, “cette organisation du travail est susceptible d’être compatible avec le bon fonctionnement de l’entreprise et le bien-être au travail”. Les services concernés sont ceux de réception de nuit et de conciergerie de nuit. Quant au service sécurité, il peut même être “compatible” avec une semaine de trois jours. “En signant cet accord, la direction de l’hôtel Prince de Galles démontre son ouverture à de nouvelles organisations à même de favoriser la compétitivité et le bien-être de ses salariés”, confie-t-on au sein du groupe Marriott International. “Il s’agit de rendre nos métiers plus attractifs, lutter contre la pénibilité de certains postes, fidéliser les équipes et, ainsi, donner envie à d’autres établissements de sauter le pas”, détaille le délégué syndical. Avec une mise en place du dispositif depuis le 1er juin. Certes, cela nécessite une sérieuse réorganisation des plannings, mais les salariés apprécient les trois ou quatre jours de repos hebdomadaires, pensés pour répartir Christophe et Delphine Dufossé ont à cœur de proposer à leurs collaborateurs une société bien structurée et un cadre de travail épanouissant. Le couple a repris en 2021 le Château de Beaulieu, un Relais & Château installé à Busnes (Pas-deCalais). En plus du restaurant gastronomique étoilé, l’établissement compte un hôtel de 21 chambres, un bistrot, un potager, une boulangerie... Transparence, respect mutuel, égalité salariale, souplesse et dialogue sont pour eux des notions essentielles pour avancer ensemble. Outre les aspects de ressources humaines que l’on pourrait désormais estimer basiques - formation, bilan annuel, jours de repos consécutifs -, le couple a également investi de façon très concrète dans du matériel pour faciliter le quotidien. Une cuisine adaptée La nouvelle cuisine est conçue pour ne plus avoir à se baisser : les fours sont à hauteur, et dans chaque zone de travail, les salariés ont accès quasiment à 360° aux équipements. Chacun dispose d’un tiroir pour ranger ses affaires. “Nous devons anticiper tout cela aujourd’hui, car parfois des détails polluent la vie”, souligne le chef, qui a en outre choisi des plateaux en carbone, plus légers, pour le confort des serveurs. Des conditions de travail agréables Deux grands vestiaires ont été créés (hommes et femmes) avec dans chacun douches, casiers, toilettes… La cantine, ouverte de 11 heures à 13 heures, dispose d’une zone froide et d’une zone chaude, et propose des menus faits maison. Les salariés peuvent fumer dans un espace spécifique, abrité. Avantages en nature “Nous habillons les équipes : nous donnons des tenues, chaussures incluses, les nettoyons, et les changeons si besoin. Pour 60 collaborateurs, cela représente un coût de 40 000 à 50 000 € par an”, détaille Christophe Dufossé. Par ailleurs, un repas pour deux est offert à chaque employé, à la brasserie ou au restaurant étoilé. Les apprentis chouchoutés Le chef recrute un nombre limité d’apprentis afin de bien les suivre. Ils ont chacun un référent. “Ils sont très jeunes, nous avons un rôle de second parent. Nous avons aménagé une maison des stagiaires et des apprentis sur la propriété : c’est rassurant pour eux, mais ils sont tout de même indépendants - les lieux incluent une cuisine, une machine à laver, etc.” Des temps conviviaux À Noël, les collaborateurs sont conviés à des activités ludiques et à un repas. Ils peuvent gagner des surprises (un séjour dans un Relais & Châteaux, par exemple) et repartent avec des chèques-cadeaux. Un goûter est organisé pour les enfants des salariés, avec des cadeaux autour du sapin. “Nous rencontrons les conjoints, cela renforce la proximité avec les familles. C’est aussi l’occasion de faire passer des messages des deux côtés”, note Christophe Dufossé. Ces deux opérations reviennent environ à 10 000 €. de façon plus équilibrée temps de travail et vie personnelle. “Une étude scandinave, sur les conséquences de la mise en place de la semaine de quatre jours, fait état d’une baisse des démissions de 57 %. Par ailleurs, 92 % des entreprises qui ont testé ce modèle l’ont conservé”, précise encore El Hadji Faye L’heure est à la pédagogie C’est dans le cadre d’une négociation annuelle obligatoire (NAO), que l’accord a été signé. Du côté de la CGT, l’heure est à la pédagogie à destination des salariés qui peuvent prétendre à la semaine des quatre jours. “Nous leur expliquons comment ça marche ”, indique El Hadji Faye, qui qualifie cet accord d’“historique” dans l’hôtellerie. À terme, il souhaiterait que tous les services “légitimes” à cette nouvelle organisation puissent passer aux quatre jours, à commencer par les services d’étages, les services supports, l’informatique ou encore la comptabilité. Parallèlement, le secteur de la restauration multiplie les exemples d’établissements déjà passés à la semaine écourtée. Parmi les derniers en date, citons le chef Thibault Nizard. Dans son nouveau restaurant L’Aube, à Paris (Ier), il a opté pour la semaine de quatre jours et demi, “afin que chacun puisse préserver une vie de famille”. Quant au chef Anthony Denon, à l’hôtel Burgundy (VIIIe), il n’ouvre le Baudelaire, table gastronomique de l’établissement, uniquement du mardi au vendredi. Dans le même temps, on ne compte plus le nombre de restaurateurs de bord de mer ou de montagne qui font de même pour attirer et fidéliser les saisonniers. Un parti pris qui répond à une réelle attente : selon l’étude People at Work 2022, 76 % des salariés de l’hôtellerie-restauration souhaiteraient bénéficier d’une plus grande flexibilité dans l’organisation de leurs horaires de travail, avec notamment la possibilité de les condenser sur une semaine de quatre jours. L’hôtel Prince de Galles et la CGT planchent sur la semaine de quatre jours Le Château de Beaulieu investit pour le bien-être du personnel MANAGEMENT Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR174601 PARIS Le 5 étoiles et la CGT ont signé un accord dans lequel la direction de l’établissement parisien indique “ne pas être opposée” à une semaine de quatre jours sur des fonctions qui lui semblent “pertinentes”. Trois services sont concernés, dont deux liés à l’hébergement. BUSNES Le chef étoilé Christophe Dufossé et son épouse Delphine ont repris en 2021 ce Relais & Châteaux. Les travaux nécessaires ont été l’occasion de repenser certains aménagements afin de faciliter le travail des équipes. “Selon une étude, la semaine de quatre jours fait chuter les démissions de 57 %”, souligne El Hadji Faye, délégué syndical CGT au sein du Prince de Galles, à Paris. © DR Anne Eveillard © DR Laetitia Bonnet-Mundschau Testée préalablement au sein de la réception de nuit et du service sécurité de l’hôtel Prince de Galles, la semaine de quatre jours a convaincu celles et ceux qui l’ont expérimentée. Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR374465 Transparence, respect mutuel, égalité salariale, souplesse, dialogue sont pour Christophe et Delphine Dufossé des notions essentielles pour avancer en équipe.

RkJQdWJsaXNoZXIy ODk2OA==