L'Hôtellerie Restauration No 3729

78 L’Hôtellerie Restauration N° 3729 - 15 octobre 2020 des diots aux sarments. On met des sarments au fond d’un gros chaudron, des aromates, des pommes de terre puis les diots - des saucisses de Savoie - avec du vin blanc et de l’eau. Les saveurs de la saucisse vont dégouliner pour nourrir la pomme de terre tandis que les sarments diffusent… Je suis arrivé à reconstituer la même chose avec un poisson du lac. L’omble chevalier est cuit sur un galet du lac et j’ai rajouté un beurre maître d’hôtel d’épicéa sur le dessus. Quand je verse l’eau, elle crée un choc thermique et de la vapeur que j’enferme sous une cloche, pour faire fondre le beurre maître d’hôtel d’épicéa qui va dégouliner sur le poisson et venir l’assaisonner. Votre plat préféré à votre carte ? Ma matelote, c’est un assortiment de poissons de lac avec une sauce à base de têtes d’écrevisses et une infusion de tanaisie, une plante de montagne. Je suis arrivé à reconstituer vraiment les éléments naturels qui entourent le lac d’Annecy, qui est à 450 m d’altitude et qui est entouré de belles montagnes. Quel est votre engagement en matière de développement durable ? Je suis né à la campagne et j’ai développé un bon sens paysan. J’ai appris à ne pas gaspiller et à me servir des ressources naturelles du territoire. J’ai commencé par faire un menu pour ma table gas- tronomique pour avoir une gestion plus fine, avec des produits de la meilleure qualité possible et moins de gaspillage. J’ai un jardin, mais ce n’est pas pour faire joli. Je forme mes équipes à faire le tri entre ce qui est compostable et ce qui servira à nourrir nos poules, par exemple. En cuisine, on ne filme plus les bacs. On utilise des couvercles que l’on nettoie et réutilise. Quand mon pêcheur du lac m’apporte les poissons, il utilise toujours le même bac, pas ceux en polystyrène à usage unique. Au lieu de me déplacer à chaque fois chez mes fournisseurs et producteurs, on s’arrange pour pro- fiter du déplacement de l’un qui fera un petit détour pour éviter de polluer inutilement. Ces détails sont très importants pour moi. Quel manager êtes-vous ? J’ai 120 collaborateurs qui ont tous des personnalités différentes. Je suis un manager humain, sensible, comme un père de famille. Deux fois par jour, on doit émerveiller le client. Alors oui, tous les jours, on doit rendre ses collaborateurs heureux. Il n’y a qu’une re- cette pour ça. Tous les soirs, on doit se dire : “Je suis très content de ma journée, de ma cuisine et je suis très content de rendre, demain, heureux d’autres gens.” Il faut être auprès de ses collaborateurs, les encourager et ne pas les abandonner. Il faut être un modèle. Il y a aussi beaucoup de petits détails qui sont importants en termes de reconnaissance. Ce qui me fait le plus plaisir, ce n’est pas quand on me dit que c’était très bon. À vrai dire, c’est mon métier et c’est normal ; c’est quand les clients me disent que le personnel était charmant, en- thousiaste et attentionné. Quels conseils donnez-vous aux jeunes qui viennent en stage ou en apprentissage chez vous ? De ne pas baisser les bras, de ne jamais lâcher. J’ai eu des moments de doute quand je suis entré dans ce métier. Cela peut venir de la fatigue car on ne sait pas gérer son propre rythme et on peut perdre pied. Il ne faut jamais oublier pourquoi on est là, ce qui nous a fait choisir ce métier. Par exemple, et c’est le montagnard qui parle, si l’on veut gravir le Mont Blanc, il faut se préparer et il n’y aura pas que des moments faciles. Pendant l’ascension, il y aura, là encore, des obstacles, mais il ne faut jamais oublier son but. La difficulté permet de se renforcer et de devenir plus performant. Qu’est-ce qui vous motive aujourd’hui ? De prendre tous les jours du plaisir à cuisiner, de découvrir de nou- veaux producteurs et de nouveaux produits, d’avoir du temps avec ma famille et dans la nature, de me rendre compte de la chance que j’ai de m’exprimer dans l’un des hauts lieux de la gastronomie française. SECRETS DE CHEF Auberge du Père Bise - Jean Sulpice Nombre de places assises : 35 Nombre de couverts par jour : 70 Ticket moyen : 250 € Prix des menus : 200 € (six étapes), 240 € (huit étapes) Effectifs : 15 personnes en cuisine, 15 en salle L’équipe Chef de cuisine : Jean Sulpice Chef pâtissier : Kevin Ollivier Directeur de salle : Alicia Poupeney Chef sommelier : Lionel Schneider Poser une question, ajouter un commentaire Nadine Lemoine > www.lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR364772 L’Auberge du Père Bise, c’est un restaurant 2 étoiles Michelin de 35 couverts, un bistrot, un hôtel, une épicerie et un spa, ouvert le 15 août dernier. © FRANCKJUERY

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