L'Hôtellerie Restauration No 3729

76 L’Hôtellerie Restauratio n N° 3729 - 15 octobre 2020 L’Hôtellerie Restauration : Comment êtes-vous devenu cuisinier ? Est-ce une vocation ? Jean Sulpice : Je voulais faire un métier avec un lien avec la na- ture, comme paysagiste, charpentier ou garde-forestier. En classe de 3 e , j’ai fait un stage de découverte en cuisine et j’ai eu le déclic. J’ai adoré ce rythme de travail, la manipulation des produits et voir l’émerveillement des clients qui prenaient du plaisir à table. Immé- diatement, je me suis dit : “C’est ce métier que je veux faire.” Cela dit, mes grands-parents étaient hôteliers-restaurateurs à Aix- les-Bains. J’ai passé mon adolescence dans cet environnement. Je furetais partout, en cuisine, dans la cave, la lingerie, etc. Même si j’ai grandi dans ce milieu, c’était pour moi un univers d’amusement et de détente. C’est quand j’ai fait ce stage, quand j’ai senti l’adréna- line du coup de feu, cette excitation de voir l’aboutissement d’une matinée de travail, que cela est devenu sérieux et passionnant pour moi. Puis, quand je suis rentré comme commis chez Marc Veyrat , j’ai retrouvé ce côté nature et plantes. Et aujourd’hui, ma cuisine est toujours guidée par la nature. Comment définiriez-vous votre cuisine ? A-t-elle évolué en pas- sant de Val Thorens au lac d’Annecy ? Ma cuisine me ressemble. Elle est ancrée dans mon territoire alpin, savoyard et haut-savoyard. C’est une cuisine de terroir qui reflète mes années d’expérience et mon amour de la nature. Elle m’inspire au fil des saisons, des produits, des textures qui changent suivant le rythme de la nature. Le métier de cuisinier, c’est être capable de créer une dynamique de cartes selon le rythme des saisons. Chose que je n’avais plus à Val Thorens, où j’étais centré sur l’hiver. En arrivant à Talloires, j’ai retrouvé ce plaisir de la saisonnalité des produits végétaux, animaux, du lac, qui sont une source d’inspi- ration. Nous en avons besoin pour nous régénérer et ne pas res- ter dans la routine. Ma cuisine peut être brute avec une certaine simplicité, parce qu’elle est dictée par une nature qui émerveille le cuisinier que je suis. C’est la nature qui m’a donné envie de venir à Talloires. Il y a une douceur, une zénitude qui sont entrées dans ma cuisine et que l’on retrouve dans le livre. Ma cuisine n’a pas changé, elle a évolué. Ma personnalité s’exprime plus aisément à Talloires, car l’environnement correspond mieux à mon tempérament et au cuisinier que je suis. Ce lieu m’apaise. Je serais incapable de m’ex- primer à Paris ou dans une grande ville, car je n’y trouverais pas ma source d’inspiration ni mon équilibre de vie. Il faut être heureux pour transmettre du bon et du bien-être dans l’assiette. Votre plat best-seller ? L’omble chevalier. C’est un souvenir d’enfance qui m’a inspiré ce plat. Quand j’allais faire les vendanges chez mon oncle, il cuisinait SECRETS DE CHEF TALLOIRES L’Auberge du Père Bise, au bord au lac d’Annecy, est devenue la maison de Magali et Jean Sulpice. Au prix de lourds et longs travaux, ils ont créé l’écrin dont ils rêvaient pour leur table doublement étoilée. Jean Sulpice : “Il faut être heureux pour transmettre du bon et du bien-être dans l’assiette” • Recettes : Jean Sulpice • Textes : Jacky Durand • Photos : Thomas Dhellemmes • Collection Le Verre et l’Assiette • Éditions Glénat • Prix : 49 € À lire : Jean Sulpice, le chef, l’Auberge et le lac RETROUVEZ TROIS RECETTES DU CHEF PAGES 79-83 © FRANCKJUERY Jean Sulpice : “Ma cuisine me ressemble.”

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