L'Hôtellerie Restauration No 3722
Michel Sarran contre Axa : “Je suis en colère et je ne lâcherai pas” “ L’attitude des assurances m’horripile un peu. Elles traitent les choses au cas par cas entre les contrats par courtier, ceux par agent… Je sais qu’il y a des négociations qui ont été passées avec tout un tas de personnes selon des modalités différentes. Donc c’est que les assureurs n’étaient pas très sereins quand même. Il y a des accords par ci, par là, c’est du grand n’importe quoi.” “On pense être assuré et on ne l’est pas” Michel Sarran est en colère : “ C’est la caricature du contrat où, par exemple, quand tu achètes un lave-vaisselle et que tu prends une garantie, il y a ce qui est écrit en gros et les petites lignes qu’il faut lire avec la loupe. Il faut être assisté de plusieurs avocats pour s’en sortir. Avec les assurances, c’est pareil. Je pensais être assuré et au final, on me dit : ‘Non Monsieur, il y a cette définition qui…’ . En fait, c’est mensonger. On pense être assuré et on ne l’est pas. C’est inacceptable !” “La restauration est un secteur très juteux pour les assurances” “Je suis fou de rage. Par rapport à crise, le Gouvernement a permis le chômage partiel, les ban- quiers ont quand même participé avec le PGE et qu’ont fait les assurances ? Elles ont juste mis de l’argent dans des fonds nationaux. Quand je sous- cris une assurance, j’attends une réponse de l’assu- rance, pas que AXA mette de l’argent dans un fonds gouvernemental. Si AXA vient manger chez moi, je ne vais pas l’envoyer chercher le pain, son couteau et sa fourchette auprès du Gouvernement. C’est ridicule ! La restauration est un secteur très juteux pour les assurances. Je leur ai dit : ‘Vous mettez à mal une profession par refus de solidarité.’ Pour beaucoup de restaurateurs qui ont la corde au cou, ils pouvaient espérer cette prise en charge. C’est terrible. Maintenant, en faisant appel, c’est entre les mains de la justice avec une décision possible entre neuf mois et un an. Je ne lâcherai pas.” M ichel Sarran a évalué les pertes d’exploita- tion de son restaurant 2 étoiles à Toulouse à près de 190 000 €, résultant de la fer- meture imposée par la pandémie de coronavirus. Ayant souscrit un contrat perte d’exploitation auprès d’Axa France, le chef se croyait couvert. Or, Axa a brandi la clause qui prévoit que “les fer- metures administratives collectives causées par une épidémie affectant plusieurs établissements dans un même département ne sont pas couvertes .” En clair, il faut donc être le seul établissement victime d’une épidémie dans son département pour que la garantie souscrite soit appliquée. Michel Sarran a donc décidé de porter l’affaire devant le tribunal de commerce de Toulouse. Le 18 août, le dernier a estimé que la “clause d’exclusion est applicable en l’espèce.” “ Débouté et dégoûté ”, le chef a fait appel. “ Cela a été un coup de massue, car on ne s’atten- dait pas à ce jugement, puisque récemment, un restaurateur de Marseille avait eu une décision en sa faveur. C’est une immense déception. On a perdu la bataille mais pas la guerre, car je crois aux arguments présentés par mon avocat et au bien-fondé de notre demande.” En parallèle, le chef doublement étoilé souligne que des accords sont passés entre les assurances et les restaurateurs : 4 L’Hôtellerie Restauration N° 3722 - 27 août 2020 L’ACTUALITÉ TOULOUSE Le 18 août, le tribunal de commerce de Toulouse a débouté le chef étoilé, qui demandait à l’assureur Axa de couvrir ses pertes d’exploitation dues au confinement. Michel Sarran a fait appel et ne mâche pas ses mots. Michel Sarran : “J’ai dit aux assurances : ‘Vous mettez à mal une profession par refus de solidarité’. ” ©WLAD SIMITCH/M6 Poser une question, ajouter un commentaire Nadine Lemoine > www.lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR364376 C’est l’interprétation de la clause d’exclusion par le tribunal qui conduit à suivre ou débouter le plaignant.” Vos commentaires Daniel Moret “Il y a aussi la loi de la concurrence. Certains assureurs, peu nombreux, ont assumé leurs responsabilités, d’autres pas ! À partir de là on peut faire un choix...” Axa condamné à verser 114 105 € à un restaurateur TARASCON Le tribunal de commerce a donné raison à Jean-Pierre Alazard, gérant du restaurant La Bergerie à Mouriès, qui demandait à son assureur de couvrir ses pertes d’exploitation dues au confinement. D’ un tribunal à l’autre, les jugements opposant des restaurateurs à leur assureur divergent. Alors que Michel Sarran a été débouté à Toulouse (lire ci-contre), à Tarascon (Bouches-du- Rhône), Jean-Pierre Alazard – gérant du restaurant La Bergerie - a obtenu le 24 août une indemnisation à hauteur de 114 105 € pour ses pertes d’ex- ploitation entre mars et mai. Dans le premier cas, Michel Sarran a fait appel, dans le second, c’est Axa, l’assureur condamné, qui a immédiatement signifié qu’il ferait de même. Comment peut-il y avoir des décisions différentes pour des affaires simi- laires ? C’est l’interpréta- tion de la clause d’exclu- sion par le tribunal qui conduit à suivre ou débou- ter le plaignant. “ Notre contrat prévoit très explicitement que les fermetures administra- tives affectant plusieurs établissements pour la même raison dans un même département ne sont pas couvertes ”, soutient Axa. De son côté, le tribunal de Tarascon a estimé “ non écrite ” la clause d’exclusion de garan- tie inscrite au contrat signé entre Axa et le restaurant La Bergerie de Mouriès, celle-ci n’étant “ni formelle, ni limitée ”. Pour Jean-Pierre Tertian , avocat du res- taurateur : “Il s’agit d’une avancée signi- ficative allant dans le sens de la prise en charge par les assureurs des pertes subies par les commerçants pendant la période de confinement.” Mais les mois passent et les affrontements au tribunal se multiplient en attendant un jugement qui pourrait enfin faire jurisprudence. Poser une question, ajouter un commentaire Nadine Lemoine > www.lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR864351
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