Secrets de chef
Gérald Passédat
plonge dans
la Méditerranée
Le chef 3 étoiles
Michelin
du Petit Nice à Marseille (13) confie ses secrets, ses passions et ses recettes pour la
première fois dans un livre absolument magnifique. Rencontre.
PROPOS RECUEILLIS PAR NADINE LEMOINE
L’Hôtellerie Restauration
:
Quand
avez-vous su que vous vouliez devenir
cuisinier ?
Gérald Passédat
:
Mes parents ont eu
la bonne idée de m’emmener très jeune
à de grandes tables. Le déclic a eu lieu
chez
Alain Chapel
[
La Mère Charles à
Mionnay, dans l’Ain, NDLR]. Entre la
classe de l’homme, l’esprit assez monacal
de l’endroit et sa cuisine, notamment sa
Nage de crustacés qui m’a subjugué, j’ai
su que je voulais avoir 3 étoiles
Michelin
un jour. J’avais 12 ans. Cela devait déjà
me titiller avant, mais ce jour-là, c’est
devenu une évidence. À cette époque, en
1972,
ce monsieur avait une créativité
tout à fait à part. À 16 ans, je suis entré à
l’école hôtelière de Nice.
S’il ne fallait retenir qu’un plat parmi
vos créations ?
Le Homard abyssal, créé en 2007. C’est
le résultat de la transformation d’un plat,
un consommé de homard au gingembre
qui ne me plaisait plus. J’ai décidé,
entre autres, d’y ajouter de la mauve,
en hommage à ma grand-mère. C’est
ce qui lui donne sa superbe digestibilité
et surtout cette couleur abyssale, anti-
culinaire. C’était un défi. Au début, les
clients ont eu du mal à comprendre.
Avec ce plat, on a l’impression de plonger
dans la Méditerranée. Aujourd’hui, je
le propose de temps en temps dans des
menus spéciaux.
Quel est le plat best-seller à votre
carte ?
Le Loup Lucie Passédat. C’est le premier
plat que j’ai mis au point. Je voulais faire
plaisir à ma grand-mère et lier la terre
et la mer dans l’assiette. Ce plat a évolué
au fil des années. Du poisson entier farci,
on est passé aux tronçons, truffes du
Ventoux, courgettes, concombre… et la
base Lucie faite minute. Mon souhait
était de réaliser un poisson que l’on
mange à la cuillère. Ce plat reflète à la
fois la Provence et la Méditerranée. Il
marche toujours très bien. Il fait partie
de mon identité et il est inscrit dans le
Menu Passédat. Mais je n’avais pas encore
compris qu’il fallait travailler et défendre
les poissons oubliés.
Le plat que vous auriez aimé
inventer ?
La Nage de crustacés d’Alain Chapel. Les
nages aux saveurs délicates, j’adore ça.
Le repas le plus éblouissant en France ?
Sans aucun doute les poissons au four
que ma tante, pharmacienne, nous
faisait le dimanche. Ils étaient sublimes.
Je précise que son mari était pêcheur.
Le repas le plus éblouissant à
l’étranger ?
Ce fut un dîner chez
Roberta Sudbrack
à Rio. J’ai été bluffé par la finesse et la
pureté de sa cuisine. C’est une femme
d’origine modeste, autodidacte, qui a
commencé par la cuisine de rue avant de
monter son restaurant.
Passédat -
Des abysses
à la lumière
Ce premier livre présente le goût de la
Méditerranée de
Gérald Passédat
,
chef
triplement étoilé du Petit Nice à Marseille.
Sa Méditerranée, pas celle des autres. Une
progression par paliers pour savourer
les poissons oubliés.
“
Ce livre, j’en ai ressenti
l’envie pour deux raisons
,
explique Gérald
Passédat.
Il s’agit d’une façon de magnifier
le poisson, car il n’a jamais vraiment été
mis en valeur, et de mettre à l’honneur la
Méditerranée, bastion de notre civilisation.
C’est aussi mon premier livre. Je pense qu’il
était temps de me confier, de transmettre. On
y trouve les recettes exactes de mes plats. Ce
livre est le fruit de mon travail de cuisinier, une
quête de l’essentiel”.
Passédat - Des abysses à la lumière
Photos :
Richard Haughton
Dessins :
Gérard Traquandi
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Prix
: 60
€
© RICHARD HAUGHTON
Gérald Passédat
:
“
Nous qui nous sommes toujours
tournés vers la Méditerranée, on peut dire que nous
sommes les premiers adeptes du locavore et de la pêche
raisonnée. À Marseille, ça coule de source et on ne l’a
jamais fait savoir.”
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