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du 25 septembre 2008

L'ÉVÉNEMENT

les syndicats s'interrogent

LA RESTAURATION FACE A LA CRISE :  EST-CE VRAIMENT GRAVE ?

La restauration traditionnelle est en difficulté. Elle souffre d'autant plus qu'elle est sujette à une concurrence très large, et souvent déloyale. La saison 2008, marquée par une météo fort défavorable et la baisse du pouvoir d'achat, accentue le phénomène. Comment le marché peut-il évoluer ? Constats et commentaires des leaders de la profession.    
Propos recueillis par Sylvie Soubes
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Didier Chenet, président national du Synhorcat

"Il y a problème, c'est sûr. Suivant les régions, le phénomène est plus ou moins ressenti, et puis il a démarré plus ou moins tôt. Mais il existe partout. À Paris, par exemple, la cassure a eu lieu début mars avec des - 7 à - 10 %, et des pics à plus de - 20 % de chiffre d'affaires en cumul et à périmètre constant. En ce qui concerne le nombre de fermetures, il faut aussi s'inquiéter. Il y a toujours eu des ouvertures et des fermetures. Fin 2006, on comptait davantage d'ouvertures que de fermetures. En 2007, la balance s'est inversée. Il y a eu plus de fermetures que d'ouvertures avec un solde négatif à 600. Il y a différents facteurs. La baisse du pouvoir d'achat des Français est indéniable. Cela fait aussi deux années consécutives que le temps estival n'est pas bon avec une saison qui se raccourcit. Le contexte n'est pas joyeux, et les professionnels doivent s'accrocher. 2008 est difficile pour tous les types d'établissements. Pour les grosses entreprises, la suppression des aides Sarkozy pèse sur les résultats. Prenez l'exemple du Groupe Flo, qui estime que l'impact atteint 40 %. Pour les très petites et moyennes entreprises, le renchérissement des matières premières crée des hausses massives à tous les niveaux. Les livraisons sont touchées à cause du prix du pétrole, tout est affecté. Et qu'on le veuille ou non, il y a les hausses successives du Smic qui viennent s'ajouter. On va vers une amplification du solde négatif dont je viens de vous parler. Le nombre de fermetures va continuer à dépasser celui des ouvertures si l'on ne fait rien. D'où la demande insistante du Synhorcat de ne pas modifier les allégements Fillon. Nous avons rencontré notamment Bernard Delpite, le conseiller fiscal du président de la République, Nicolas Sarkozy. Nous préparons un dossier très argumenté, avec tous les chiffres à l'appui, et nous allons le présenter rapidement. On ne peut pas passer sous silence une situation difficile. Compte tenu des mesures prises ici et là par le gouvernement, le modèle économique de nos entreprises est totalement chamboulé. Et cette réflexion touche toutes les entreprises, petites et grandes. Nous devons réagir très vite pour que la profession puisse avancer."


Philippe Lefèvre, président des restaurateurs de la CPIH*

"La saison n'a pas été bonne. On est obligé de mettre de l'essence dans la voiture, et le budget est grevé, y compris par d'autres postes comme le téléphone ou la télévision. Le constat, c'est que les gens perdent l'habitude d'aller au restaurant, ils se détachent de la convivialité. Dans mon département de l'Eure, on a enregistré une baisse des chiffres de 15 % en règle générale. Ceux qui tirent leur épingle du jeu, ce sont parfois des installations récentes qui sont en poussée de clientèle. Dans le traditionnel, je pense à un établissement qui se situe dans le haut de gamme, qui affiche une légère augmentation du ticket moyen, mais la fréquentation est en diminution. Quand les gens vont dans cet établissement, ils dépensent un peu plus mais y vont moins souvent. Vous savez, en traditionnel, on souffre aussi de la concurrence tous azimuts. Dans notre département, nous avons des agriculteurs qui se sont réunis, pour vendre leurs produits. Jusque-là, pas de problème. Sauf qu'aujourd'hui, ils ont créé un self-restaurant où ils vendent autre chose que leurs produits avec un menu à 8,50 euros. Comment voulez-vous qu'un restaurant traditionnel suive ? Tout le monde fait ce métier et ça plombe l'activité. Quant à l'immobilier, on le sait, le flux des ventes est très calme. En juin, quand de belles affaires se sont vendues, c'était en dessous de leur valeur. Certes, des bars-épiceries dans les campagnes restent en activité, mais les gens vivotent. Et puis, il faut cesser de tout amalgamer. On parle de la peur du gendarme, sauf que si le prix de la consommation de vin est compris dans le tarif, il n'y a pas de baisse. Je le constate chez moi, dans le cadre des cérémonies. Les gens, quand ils sont en groupe, décident de qui va conduire. En revanche, la consommation de vin à la bouteille, hors menu, est devenue chère pour le consommateur qui se tourne vers le verre ou le pichet, ou la carafe d'eau…"

* Président de l'Eure


Philippe Villalon, président de la Fédération nationale de la restauration française de l'Umih*

"Il est difficile de ressortir quelque chose de clair. On cumule les difficultés cette année. La baisse du pouvoir d'achat, une saison estivale marquée par une mauvaise météo… On n'est pas dans une situation de normalité. La sinistrose ajoute à la sinistrose… Les deux secteurs les plus touchés sont la restauration et l'immobilier. On est obligé de faire des synthèses. Ça n'engage pas la force vive de la profession, et il faut attendre quelques mois mais il faut être réaliste. On a vraiment besoin de la justice fiscale que représente la baisse de la TVA pour que le secteur ait les moyens de renforcer, notamment, son attractivité auprès des jeunes par de meilleurs salaires. Si je prends l'exemple de mon département, le Calvados, quand des villes comme Deauville ou Arromanches se plaignent, quand les casinos de Deauville annoncent des chiffres à la baisse, c'est qu'il y a un réel problème. Je pense qu'il ne faut pas mettre la charrue avant les bÏufs. Regardons la réalité du terrain. Le secteur de la restauration, avec son grand nombre d'ouvertures et de fermetures d'établissements, affiche une instabilité qui s'explique par un manque de professionnalisation. On voit des gens qui trouvent dans la restauration une planche de salut en créant, avec aucune expérience ni expertise, 20 ou 30 places. Le temps qu'ils vont durer, même s'il n'est jamais long, va déstabiliser l'activité. Surtout qu'il y a un phénomène de turn-over, d'autres non-professionnels s'installent, repartent, etc. Les vrais professionnels souffrent de ces montagnes russes. Il faut absolument renforcer le principe que l'obtention d'ouverture d'un restaurant soit liée, auparavant, à une formation reconnue."

*Président du Calvados

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L'Hôtellerie Restauration n° 3100 Hebdo 25 septembre 2008 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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