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du 21 février 2008
GÉRER SON ENTREPRISE

QUAND LE 'TIP' PEUT ATTEINDRE 2 000 $ PAR SEMAINE

LES POURBOIRES, UN ENJEU DE MANAGEMENT ET DE FIDÉLISATION À L'AMÉRICAINE

New York (États-Unis) Le client paye le service en fonction de son degré de satisfaction. Cela change la donne au niveau du management. Travailler plus pour gagner plus. Le principe semble fonctionner. Exemples à Big Apple.

Laurent Tourondel, chef des restaurants BLT. Pierre Siue, directeur des opérations au restaurant Daniel.

Imaginez un pays où l'on décide du montant de l'addition en fonction de son degré de satisfaction… Voilà le génie de l'Amérique. Dans les faits, seul le prix du service est laissé aux bons soins du client. Même si, tacitement, les pourboires ('tips') s'élèvent en moyenne entre 15 et 20 % de la note (environ 2 fois la taxe, ce qui représente 16,50 %), il n'y a pas de règles en la matière. Les fameux tips peuvent être parfois beaucoup plus importants. En termes de management, cela change la donne. "Il est plus facile de gérer des équipes qui sont rémunérées aux pourboires. Cela crée un facteur de motivation supplémentaire", explique Estelle Lamotte, assistante directrice de restauration au restaurant 3 étoiles Jean-Georges, à la tête d'une équipe de 80 personnes. Et le personnel peut gagner des sommes douillettes : "En salle, le salaire des serveurs peut grimper jusqu'à 2 000 $ (1 350 E) par semaine. Il arrive qu'ils gagnent plus que le personnel de management…", dit-elle.
C'est un autre rapport à l'argent avec lequel il faut se familiariser lorsqu'on est Français. Ce système existe également en Angleterre, les pourboires étant cependant moins élevés d'environ 10 %. "Mon expérience à Londres m'a permis d'assimiler ce système, explique Estelle Lamotte. Par ailleurs, les États-Unis sont plus ouverts aux femmes en salle : en France, il y en a encore très peu." Quoi qu'il en soit, le système des pourboires ne fonctionne que dans la mesure où les clients jouent le jeu. Les Français ont la réputation de ne pas être aussi généreux. Pour l'anecdote, l'expression 'french tip' signifie un pourboire particulièrement dérisoire… Il arrive que le service soit ajouté d'office au total.

Déclarer les pourboires
Dans l'État de New York, un salarié perçoit aujourd'hui un salaire minimum de 7,15 $ (4,80 E) de l'heure. Si le salaire de base varie, les pourboires représentent souvent la majeure partie des revenus du personnel. Le salarié doit ensuite payer des impôts, qui représentent environ 35 % du revenu total (dépendant de sa situation familiale) en incluant les pourboires. Quand le restaurant est quasiment vide, durant les mois 'creux' par exemple (moins de touristes ou la Bourse qui fait grise mine), les serveurs sont les premiers affectés, le coût de la vie étant très élevé à New York.
Un système qui dissocie le service de la cuisine peut sembler injuste : la satisfaction du client dépend d'une impression générale, de 'l'expérience' du restaurant. Un serveur aura beau se plier en quatre, si la cuisine n'est pas à la hauteur, le client ne sera pas entièrement satisfait et donnera logiquement moins de pourboires. Dans les faits, le secteur de la restauration à New York est tellement concurrentiel qu'un établissement qui n'attire pas assez de clients ne parviendra pas à garder ses employés. "Il y a une crise de l'hospitalité aux États-Unis", dit Laurent Tourondel, chef des restaurants BLT. Si le pays a de prestigieuses écoles de cuisine et de management comme l'université Johnson & Wales ou le Culinary Institute of America, il existe très peu d'écoles hôtelières comme en Europe." Le pays manque de professionnels, aussi bien en nombre qu'en termes de formation. "L'art de la table n'est pas aussi développé aux États-Unis qu'en France", dit Pierre Siue, directeur des opérations au restaurant Daniel.

Les grandes maisons, une valeur sûre
Dans les restaurants ou bars branchés, les serveurs peuvent être des acteurs, étudiants ou mannequins. Cela ne va pas sans conséquence. "Même si personne ne le dit ouvertement, un homme gagnera toujours moins de pourboires qu'une femme", explique le barman d'un café dans le nord de Manhattan. Dans les restaurants, les pourboires ne sont pas toujours aussi mirobolants que dans certaines discothèques, mais les grandes maisons représentent une valeur plus sûre pour les employés, les discothèques ayant un cycle de vie très court à New York. Il est à la guise de chaque restaurant de décider si les pourboires sont mis en commun ou si les serveurs empochent ceux des tables dont ils se sont occupés. Au restaurant Daniel, qui compte 60 personnes en salle, les pourboires du jour sont mis en commun au sein d'une même 'pool' (une équipe constituée d'un maître de rang, de chefs de rang, de demi-chefs de rang et de commis), puis redistribués avec un système de points. La formation de 'pools' relève quasiment de la psychologie, et chaque détail compte. "Nous prenons soin d'équilibrer au maximum les équipes de salle, entre hommes et femmes", explique Pierre Siue.
Le système des tips est-il éminemment équitable ou totalement injuste ? Si le restaurant marche bien, c'est un système gagnant-gagnant, favorisant le travail d'équipe et la cohésion entre la cuisine et la salle. Cela permet aussi d'offrir un service d'une grande qualité. Dans un secteur aussi concurrentiel que la restauration, ça fait la différence.
Laure Guilbault zzz99 GE0607 RE0607

jean-georges.com ou danielnyc.com

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