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du 08 décembre 2005
SÉCURITÉ AU TRAVAIL

UNE DÉCISION QUI VA VOUS POSER DES PROBLÈMES

L'obligation de protection de la santé des salariés l'emporte sur la liberté de fumer des clients

Le 29 juin dernier, la Cour de cassation a décidé que l'employeur a une obligation de sécurité de résultat à l'égard de ses salariés victimes de tabagisme passif. Explications.

Dans cette affaire, il était reproché à un employeur de ne pas avoir pris les mesures pour protéger une salariée soumise à la fumée de ses collègues dans un bureau collectif. La salariée a adressé une lettre de 'démission forcée' à son employeur, que la Cour de cassation* a requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Motif : celui-ci n'avait pas respecté son obligation de protéger la santé de sa salariée. Cette décision est transposable aux restaurants/débits de boissons et doit être lue à la lumière d'un autre arrêt, rendu en 2004 par la cour d'appel de Rennes*, qui a décidé de la même façon, pour un salarié, serveur dans un bar, qu'il était en droit de quitter son poste, car importuné par la fumée. La salle était ouverte aux fumeurs, avec un extracteur de fumée dirigé vers le bar où le salarié se trouvait le plus souvent. L'employeur n'avait pas organisé les lieux de façon à cantonner les fumeurs dans des espaces mis à leur disposition. Il avait seulement collé des étiquettes 'zone fumeurs' sur des tables. La cour d'appel a jugé qu'en l'obligeant à travailler dans une zone polluée, l'employeur avait porté atteinte au droit et à la santé du salarié.
Le Code de la santé publique interdit de fumer dans tous les lieux fermés et couverts accueillant du public, ou qui constituent des lieux de travail. Or, vos établissements sont à la fois des lieux recevant du public et des lieux de travail. Si vous entendez déroger au principe d'interdiction, vous devez organiser les lieux de telle manière que les fumeurs soient cantonnés dans un espace réservé.
Ce que signifie concrètement l'obligation de résultat à laquelle la Cour de cassation fait référence. Vous devez par tous les moyens réussir à protéger effectivement vos salariés de la fumée. À défaut, si une maladie professionnelle se déclare, par exemple, le salarié pourra vous poursuivre devant le tribunal pour faute inexcusable, et vous pourrez être amené à lui verser des indemnités.
Des enquêtes révèlent que le risque de maladies cardiovasculaires est le risque majeur de mortalité lié au tabagisme passif, que la femme enceinte dans une ambiance enfumée de tabac doit être considérée comme une personne particulièrement à risque. Chez les travailleurs non-fumeurs du secteur restauration/débits de boissons, le risque de cancer du poumon est multiplié par 2.
Vous avez l'obligation de prendre soin de la santé et de la sécurité de vos salariés. C'est inscrit dans le Code du travail. Cette obligation comprend la protection des salariés contre la fumée de cigarette. Par sa décision du 29 juin 2005, la Cour de cassation se montre particulièrement sévère et durcit sa position à l'encontre des employeurs dont les salariés sont victimes de tabagisme passif.

En outre, dans une réponse ministérielle publiée au Journal officiel du 15 novembre 2005*, le ministre de la Santé et des Solidarités a affirmé que cette décision du 29 juin est transposable au secteur des CHR pour la protection de leurs employés dans les salles ouvertes aux consommateurs, et de rappeler que les agents du ministère de la Santé et les inspecteurs du travail ont compétence pour vérifier le respect de la réglementation protégeant les non-fumeurs dans les débits de boissons. Voici donc quelques suggestions qui vous aideront à agir au mieux afin d'éviter d'éventuels conflits.    
Carole Gayet, information juridique, INRS www.inrs.fr zzz32

* Cour de cassation (ch. sociale) - 29 juin 2005 - CA de Rennes 16 mars 2004.

Les questions à se poser

… Suggestions

Votre établissement est ouvert aux fumeurs ? Aménagez une zone réservée aux fumeurs
Vous devez apposer une affiche rappelant le principe d'interdiction de fumer.
Vous avez une zone fumeurs ? Assurez-vous que le dispositif d'aération et de ventilation soit correct.
Vous devez indiquer les emplacements réservés aux fumeurs.
Votre serveuse est enceinte ? Choisissez de l'affecter exclusivement en zone non-fumeurs.
Vous avez plusieurs serveurs/serveuses ? Affectez-les alternativement en zones fumeurs et non-fumeurs.
Pour vous aider, n'hésitez pas à faire appel à votre Cram (Caisse régionale d'assurance maladie) ou à l'INRS (Institut national de recherche et de sécurité).
 

 

Que dit le Code de la santé publique ?
L'interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif s'applique dans tous les lieux fermés et couverts accueillant du public ou qui constituent des lieux de travail (R.3511-1).
Dans les locaux commerciaux, où sont consommées sur place des denrées alimentaires et des boissons, une organisation des lieux, éventuellement modulable, peut être prévue pour mettre des espaces à la disposition des usagers fumeurs (R.3511-13).
Ces emplacements sont déterminés par la personne responsable de ces lieux, en tenant compte de leur volume, de leur disposition, de leur condition d'utilisation, d'aération et de ventilation, et de la nécessité d'assurer la protection des non-fumeurs (R.3511-2). Une signalisation apparente rappelle le principe de l'interdiction de fumer et indique les emplacements mis à la disposition des fumeurs (R.3511-7).

Et le Code du travail ?
L'employeur doit aussi appliquer les mesures relatives à l'aération, la ventilation, l'assainissement des lieux de travail (R.232-5 à R.232-5-14 du Code du travail).

Complément d'article 2954p34

12e législature question n° 70 662 de M. Bourg-Broc Bruno (Union pour un mouvement populaire - Marne)

Texte de la question : La Cour de cassation vient d’estimer qu’un employeur a une obligation de résultat quant à l’application de la loi antitabac et doit donc protéger ses salariés contre les nuisances causées par les fumeurs. M. Bruno Bourg-Broc demande à M. le ministre de la Santé et des Solidarités si cet arrêt est, à son avis et sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, transposable aux restaurateurs et débitants de boissons quant au respect du droit des consommateurs à un environnement préservé des fumées du tabac dans leurs établissements.

Texte de la réponse : Dans un arrêt du 29 juin 2005, la Cour de cassation a considéré que l’employeur était tenu d’assurer la protection effective des non-fumeurs, et a imposé au chef d’entreprise une "obligation de sécurité de résultat". Cet arrêt est transposable aux débits de boissons pour la protection de leurs employés dans les salles ouvertes aux consommateurs. De cette façon, l’obligation faite aux propriétaires ou gérants de débits de boissons de veiller au respect de l’interdiction de fumer sur le lieu de travail que constitue un débit de boissons doit profiter également aux consommateurs non-fumeurs. Par ailleurs, dans le cadre de la loi du 9 août 2004 qui a donné compétence à des agents du ministère de la Santé et aux inspecteurs du travail pour vérifier la conformité des lieux collectifs à la réglementation relative au tabagisme en public, la vérification du respect de la réglementation protégeant les non-fumeurs dans les débits de boissons, introduite en 2004, se poursuit en 2005. Enfin, à l’occasion de la journée mondiale sans tabac du 31 mai 2005, le ministre de la Santé et des Solidarités a demandé à l’inspection générale de lui remettre un rapport, avant la fin 2005, sur les conditions juridiques et pratiques de mise en œuvre de cette mesure.

Question publiée au JO le 26/07/2005 page 7 313
Réponse publiée au JO le 15/11/2005 page 10 642

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