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Actualité juridique

Exploiter son fonds de commerce en SARL

Gérance majoritaire ou minoritaire ?

Vous avez constitué une SARL pour exploiter votre établissement et vous souhaitez avoir le statut de salarié. Il est difficile de cumuler le statut de gérant qui bénéficie des pouvoirs les plus étendus sur la société, avec celui de salarié qui se caractérise par l'état de subordination. Si la jurisprudence l'accepte sous certaines conditions, il faut avant tout ne pas être un gérant associé majoritaire ou se comporter en tant que tel.Etre gérant majoritaire

Vous êtes considéré comme gérant associé majoritaire lorsque vous détenez personnellement plus de la moitié des parts de la société ou par personne interposée, c'est-à-dire en additionnant vos parts à celles détenues en propriété ou en usufruit par votre conjoint (quelque soit le régime matrimonial) et celles de vos enfant mineurs non émancipés.

* Ainsi, si vous détenez 51% des parts de la société, vous êtes un gérant majoritaire.

ex. : vous détenez 45% des parts de la SARL, vous êtes marié sous le régime de la séparation des biens, votre conjoint et votre fille de 17 ans détiennent chacune 3% des parts, ce qui représentent 6% en totalité. Dès lors, vous possédez indirectement 51% des parts sociales de la société et vous êtes considérés comme gérant majoritaire.

* Par ailleurs, pour déterminer si vous êtes gérant majoritaire ou non, la jurisprudence prend en compte le fait que vous dirigiez une société ou que vous soyez actionnaire d'une société associée à la SARL.

ex. : vous détenez 20% de parts de la SARL Gourmand et 60% de la SA Gourmet qui elle-même détient 65% de la SARL Gourmand. Vous contrôlez donc 85% de la SARL Gourmand, 20% directement et 65% indirectement.

* S'il y a plusieurs gérants, chaque gérant est considéré comme majoritaire dés lors que les co-gérants détiennent ensemble plus de la moitié des parts sociales.

En revanche, les parts détenues par vos enfants majeurs, par les enfants du conjoint issus de son premier mariage, par vos ascendants ainsi que celles de votre concubin ne sont pas prises en compte pour apprécier la fraction du capital que vous possédez.

Ex. : vous détenez 40% des parts de la société, vous êtes associé avec votre concubine qui possède 10% des parts, votre fils de 19 ans a 5% des parts, votre fille de 16 ans détient 15% et le fils de votre concubine 10%. Vous exercez un contrôle majoritaire de 55% sur la société puisque vous possédez directement 40% des parts auxquelles il convient d'ajouter les 15% de votre fille mineure. Les parts de votre concubine ainsi que celles de son fils et du vôtre qui est majeur ne sont pas prises en compte pour la fraction du capital détenu.

Le statut social
du gérant majoritaire

Si vous êtes gérant associé majoritaire, vous êtes assimilé à un travailleur indépendant et vous êtes affilié obligatoirement au régime de sécurité sociale des travailleurs non salariés.

Vous devez être obligatoirement affilié à trois caisses sociales. Un organisme conventionné par la caisse maladie Régionale (CMR), l'URSSAF pour les allocations familiales et une caisse d'assurance vieillesse qui relève de l'ORGANIC. Vous pouvez déduire de votre revenu imposable les cotisations versées au titre des régimes de protection sociale complémentaire facultatifs.

En tant que travailleur indépendant, vous devrez verser des cotisations sociales forfaitaires en début d'activité même si vous n'avez perçu aucune rémunération. Pour les années suivantes, vos charges sociales seront calculées sur votre rémunération. Celle-ci est déductible fiscalement pour la société. En revanche, les charges sociales ne sont pas prises en compte au niveau de votre imposition personnelle.

Etre gérant minoritaire ou égalitaire

Vous êtes considéré comme gérant minoritaire si vous détenez moins de 50% des parts de la société.

Ainsi, si vous possédez 10% du capital, votre épouse 10%, votre fille de 22 ans 30% et votre fils de 14 ans 10%, vous êtes considéré comme gérant minoritaire détenant 30% des parts sociales.

En tant que gérant minoritaire ou égalitaire, vous pouvez recevoir une rémunération au titre de votre mandat social. Vous êtes alors assimilé à un salarié et vous bénéficiez du régime de sécurité sociale et de retraite des cadres. En revanche, vous ne bénéficiez pas des avantages réservés aux salariés, c'est-à-dire que vous ne pouvez pas vous prévaloir de la convention collective, et vous n'êtes pas soumis aux règles de droit du travail.

Une petite précision s'impose : si vous êtes gérant minoritaire ou égalitaire non rémunéré, vous ne bénéficiez d'aucune couverture sociale puisque vous ne relevez ni du régime des non-salariés, ni du régime général des salariés. Toutefois, cette absence de couverture sociale palliera le fait que vous pouvez exercer une autre activité qui ouvre droit aux prestations sociales.

Par ailleurs, vous pouvez en qualité de gérant minoritaire conclure un contrat de travail avec la société et devenir ainsi salarié. Toutefois, cette possibilité n'est valable qu'à certaines conditions qui ne sont pas définies par la loi, mais qui sont en revanche déterminées par la jurisprudence.

Avoir le statut de salarié

Votre contrat de travail doit être réel. En effet, il doit être écrit et doit définir précisément une fonction technique particulière. Votre contrat doit correspondre à un emploi effectif qui comporte des fonctions techniques distinctes de celles de la direction générale de la société. Vous pouvez être cuisinier et gérant en même temps. En revanche, vous ne pouvez pas être responsable commercial et gérant.

De plus, la fonction technique ne doit pas entrer directement dans l'objet social de la société. Ainsi, «responsable de la restauration» n'est pas une fonction distincte pour une société dont l'objet social est la restauration.

En outre, si votre mandat social de gérant est rémunéré, vous devez percevoir deux rémunérations distinctes, une pour la fonction salariée et une pour le mandat de gérance. Vous devez donc disposer de deux feuilles de paie.

Par ailleurs, votre contrat de travail étant considéré comme une convention conclue avec la société conformément à l'article 50 de la loi du 24 juillet 1966, doit faire l'objet d'un rapport spécial de la gérance qui est soumis à l'Assemblée générale annuelle des associés. Vous ne pourrez pas participer au vote et vos parts ne seront pas prises en compte pour le calcul de la majorité.

Etre en état
de subordination

Enfin, vous devez être placé dans un état de subordination à l'égard de la société. En effet, en tant que salarié, vous êtes soumis au pouvoir de votre employeur ce qui implique la soumission à certaines règles parmi lesquelles nous pouvons retenir le respect des instructions, les retenues de salaire pour les heures d'absence, la rédaction de rapports d'activité.

Le lien de subordination est absent dés lors que vous vous occupez en totale liberté de la gestion et du fonctionnement du restaurant, vous détenez seul la signature bancaire. Si vous utilisez le matériel et les locaux de la société sans en référer à un supérieur, vous acceptez les traites au nom de la société, bref si vous vous comportez en véritable maître de l'entreprise.

L'exigence de ce lien de subordination à l'égard de la société implique que le gérant qui prétend à un contrat de travail ne soit pas gérant associé égalitaire ou majoritaire de la société. Vous devez être minoritaire, c'est-à-dire posséder directement ou indirectement moins de la moitié des parts de la société. Si vous détenez 50% à 60% des parts de la société et si vous êtes salarié, votre contrat est nul en raison de l'absence de tout lien de subordination avec l'entreprise.

Si toutes ces conditions sont remplies, vous pouvez cumuler votre mandat social de gérant avec un contrat de travail. Vous percevez une rémunération en contrepartie de votre contrat de travail et vous êtes considéré comme un véritable salarié et bénéficiez des avantages sociaux liés au statut de salarié. Vous êtes obligatoirement affilié au régime général de la sécurité sociale. Vous pouvez être affilié aux ASSEDIC, mais si vous exercez réellement votre emploi dans un état de subordination. En effet, les ASSEDIC peuvent invoquer l'absence de lien de subordination pour vous refuser le bénéfice des allocations chômage. Ainsi, vous ne travaillez pas sous la subordination de la société, si vous assurez la direction de la société dans la mesure où vous possédez la quasi-totalité des parts et si vous faites exécuter des commandes de clients sans rendre des comptes.

Par ailleurs, les ASSEDIC refusent le bénéfice des allocations chômage à des gérants minoritaires ou égalitaires d'une petite société dans laquelle il n'y a pas de réelle séparation entre la fonction de gérant et la fonction technique, par exemple dans le cas où vous cumuleriez le mandat de gérant avec un emploi de directeur commercial.

Le gérant de fait ne peut être salarié

Les ASSEDIC refusent d'octroyer des prestations aux gérants de fait puisque les conditions exigées pour le cumul d'un mandat social et d'un contrat travail ne sont pas remplies.

Le gérant de fait relève du régime des travailleurs indépendants quelque soit le nombre de parts dont il est détenteur. Ainsi, vous ne pourrez pas bénéficier de la protection sociale des salariés si vous êtes considéré comme un gérant de fait, c'est-à-dire si vous remplissez des fonctions de gérance sans avoir été investi d'un tel mandat et que vous disposez d'un pouvoir de décision.

Ex. : vous possédez 40% des parts et votre frère les 60% restant, vous êtes donc minoritaire. Mais vous exercez la fonction de directeur commercial, vous disposez de pouvoirs étendus sur la gestion sociale en signant des effets de commerce, des reconnaissances de dettes et des déclarations fiscales, vous serez alors considéré comme gérant de fait de la société et la qualité de salarié vous sera refusé.

Il est conseillé de faire une demande de renseignement auprès des ASSEDIC qui détermineront si vous êtes titulaire d'un contrat de travail et si vous êtes susceptible d'avoir droit aux allocations chômage.

Où cotiser pour
l'assurance chômage ?

Si vous ne pouvez bénéficier de l'assurance chômage des salariés, vous devez cotiser à l'un des deux régimes spécifiques d'assurance chômage. La Garantie Sociales des Chefs et des Dirigeants d'Entreprise (GSC), 9 rue Brunel 75017 Paris ou l'Association pour la Protection des Patrons Indépendants (APPI) 25 boulevard de Courcelles 75008 Paris.

Vous pourrez déduire les cotisations de votre revenu. Si votre cotisation est prise en charge par la SARL, elle est déductible des bénéfices imposables.

Le statut fiscal
du gérant

Depuis le 1er janvier 1997, que vous soyez gérant majoritaire ou minoritaire, mais détenteur de plus de 35% des parts sociales, vous relevez du même régime fiscal que les salariés.

Vous pouvez choisir entre déduire de vos revenus, vos frais professionnels réels et justifiés ou appliquer l'abattement forfaitaire de 10% limité à 73.720 francs. En outre, vous bénéficiez de l'abattement général de 20% du montant de vos salaires nets de frais professionnels jusqu'à hauteur de 667.000 francs. Cet abattement est ramené à 10% pour la fraction de la rémunération nette de frais professionnels comprise entre 469.000 francs et 667.000 francs.

Les dividendes que vous percevez sont imposables au titre de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus mobiliers.

Manon Abitan



L'HÔTELLERIE n° 2529 Hebdo 2 octobre 1997

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